Ma très chère Héléna,
Mon salut, je le sais trop bien, réside dans la manière que je répondrai à votre message. Je sens qu'à l'intérieur de moi, mes sentiments et ma raison se vouent une bataille impitoyable, à la lecture de votre message. Il est très difficile de comprendre ce qui m'arrive; c'est pourquoi bien des gens, conseillers et autres, ont eu beaucoup de difficultés à me regarder hésiter devant l'évidence même.
J'ai recommencé dernièrement à me parler seule et à repousser les pensées destructives ou négatives qui me viennent à l'esprit. "Non, je ne veux pas." "Non, ce n'est pas vrai." Je me surprends moi-même de mes batailles surgissant de mon inconscient. Comment expliquer cela à quelqu'un qui n'a pas vécu et vit encore ce que je vis.
Ma mère, elle-même, m'a très souvent répété que tant que je ne m'aimerai pas, personne ne me respectera et on abusera de moi de toutes sortes de manière. Si j'inspire le plus grand respect dans ma vie professionnelle et je sais m'affirmer et faire valoir mes idées, j'ai très souvent failli en ce sens dans ma vie privée. Mais, la personne qui en a le plus abusé dans ma vie d'adulte est Firouz. Il m'a fait très, très mal. Je me suis replié sur moi-même et je ne vivais qu'avec l'espoir de me réconcilier avec lui, dans l'attente d'une autre période idyllique. La roue de la violence ?
À l'aube de mes trente-six ans, je veux enfin être respectée. Oui, je le veux ! Je me rends compte que j'ai beaucoup donné dans ma vie sans rien attendre en retour et sans rien recevoir aussi (je parle surtout de Firouz). Je ne veux plus pleurer parce qu'on ne me fait pas justice ou parce qu'on a piétiner sur mes sentiments et mes convictions profondes. Je ne veux plus faire de compromis et passer l'éponge sur des événements qui m'ont marqués de peur de perdre son "amour". Je veux entendre quelqu'un s'excuser et demander pardon lorsqu'on m'a blessée.
Ce qui me fait peur chez moi, c'est cette tendance à me laisser imbibée de la frustration et de la colère des autres et les laisser me porter le fardeau avec eux ou entièrement. J'ai peur aussi de moi-même, car je sens toujours ce besoin de me faire mal. C'est comme si je me lacérais le visage jusqu'à ce que je saigne et que mes cris de douleurs puissent être justifiés aux yeux des autres et que ma vraie douleur puisse enfin sortir de moi. Ma vie entière le témoigne, surtout ma relation avec Firouz.
Je ne sais ce qui s'est passé ou ce qui m'est arrivé pour me causer d'être déchirée en deux. Mais, cela doit remonter à ma tendre enfance.
Non, je ne suis pas sentie respectée par Firouz. Il m'aimait à sa manière; à la manière d'un abuseur. Il utilisait des "stratégies" pour arriver à ses fins, me manipuler. Il utilisait même les menaces et le chantage. Je le savais et je lui pardonnais. J'essayais toujours de croire à un meilleur lendemain.
Aujourd'hui, j'ai perdu tout espoir de pouvoir vivre mon bonheur avec Firouz, car il est en incapable. J'ai éprouvé son amour dernièrement en partageant mes émotions et en lui disant comment il me faisait sentir par ses propos imprégnés de soupçons. Je lui ai dit que ma poitrine se serrait très souvent lorsqu'il invalidait ce que je disais en lui parlant de ma réalité. Malheureusement, il a refusé de m'entendre et m'a dit qu'il ne m'avait jamais fait aucun mal.
Je sais qu'il avait fixé une "date d'échéance", car il sentait qu'il me perdait, qu'il perdait son emprise sur moi, et voulait me brusquer dans ma décision, avant qu'il ne recommence à laisser sa colère remonter.
Ce que je veux de Firouz ? Qu'il admette tous ses torts, qu'il me voue un amour inconditionnel, qu'il accepte sa part de responsabilité dans la relation et qu'il ne me fasse plus jamais pleuré. Je veux aussi qu'il m'écoute sans vouloir me contredire et qu'il montre sa volonté de me comprendre. Je veux qu'il cesse de me menacer ou de faire du chantage. Je me rends compte que je demande l'impossible et que je dois m'y résigner.
J'ai tellement souffert et j'acceptais de souffrir pour vouloir me faire aimer et préserver une relation qui était en fait une relation de abuseur-victime. J'ai peur maintenant de tenter de le faire lâcher prise et qu'il me harcèle. Car je sais qu'il a encore besoin de moi. Mais, je ne veux pas qu'il me détruise davantage.
J'ai tout fait, absolument tout fait, pour tenter de lui vivre le bonheur. Pour lui faire goûter aux plaisirs de la vie. Même devant l'océan, il n'arrivait pas à trouver la sérénité et continuait à tourmenter son entourage.
Héléna, je ne sais si c'est normal, mais en écrivant ces lignes, je me mets à trembler et les larmes coulent tranquillement sur mon visage.
Ce que je veux : être heureuse et ne plus avoir peur de l'être. Aimer et ne plus avoir peur d'être déçue. Je l'ai trop aimé et d'une manière je l'aime encore. J'ai si peur de céder encore à ses stratégies astucieuses pour me regagner. Croyez-moi, si je pouvais espérer que Firouz puisse changer et ne plus jamais me traiter comme il l'a fait, je ferais n'importe quoi pour pas le perdre. Mais, je ne le laisserais plus me manquer de respect...
Héléna, dites-moi, je vous en prie, d'après vous, ai-je raison de dire qu'il a abusé de moi ? Étais-je vraiment dans une relation abusive ou vous le voyez autrement ?
Avoir tant aimé et se retrouver dans un impasse.
Héléna, merci encore de me soutenir en cette période extrêmement difficile de ma vie.
Anam Cara