Bonjour Héléna,
J'ai l'impression de vous avoir laissé tombé en interrompant momentanément nos échanges.
Je ressens un malaise très profond. J'ai beaucoup de difficulté à me concentrer et je m'épuise à tenter de garder mon équilibre entre ma vie professionnelle, ma vie conjugale et les batailles que je me livre dans ma tête. Je ferais n'importe quoi pour retrouver la paix intérieure et vivre enfin dans le bonheur.
La raison pour laquelle je ne vous ai pas répondu jusqu'à aujourd'hui est tout simplement la honte d'avoir succombé pour la énième fois à la manipulation de mon amant. J'ai fait fi de nos différents et j'ai répondu à ses messages doux et tendres allant chercher en moi ce qu'il y a de plus vulnérable : mon besoin insatiable de sentir qu'il me désire éperdument.
À tout le moins, je lui ai avoué que je me suis rendue compte qu'il ne répondait pas à mes attentes et ne respectait pas mes sentiments. Il est donc conscient que je suis sur mes gardes. Je lui ai dit aussi que si nous nous complètons parfaitement sur le plan sensuel et sexuel, nous ne nous rejoignons pas sur beaucoup d'autres plans à cause de la difficulté à communiquer causé en majeure partie par son tempérament.
Héléna, je n'ai jamais parlé aussi franchement qu'à moi-même à une autre personne. Et vous êtes cette personne...
Je vous l'avoue, mon amant éveille en moi des pulsions si fortes que je ne peux m'imaginer pouvoir m'en passer un jour.
La semaine dernière, je regardais une émission sur le canal Discovery qui parlait de l'érection chez les hommes et de plus aspects de la sexualité chez les hommes. Un documentaire très intéressant explorant la sexualité au masculin d'une manière très ouverte et avec sensibilité. On y parlait entre autres du lien entre la grosseur du pénis et de l'orgasme au féminin. D'après ce documentaire, certaines femmes connaissent l'orgasme en étant stimulée à l'entrée de leur vagin et certaines autres en étant stimulées plus profondément (désolée, je n'ai pas retenu les termes médicaux). Or les femmes qui arrivent à l'orgasme en étant stimulées à l'entrée du vagin, c'est mon cas, vont préférer les hommes avec des pénis moins proéminents et moins longs... c'est le cas de mon amant. Par contre, mon mari est tout le contraire et je me rappelle qu'au début de ma vie conjugale, j'avais beaucoup de difficultés à faire l'amour, surtout pendant plusieurs jours consécutifs. Ceci pourrait être une explication plausible à mes problèmes sexuels avec mon mari.
Je me déteste, car je ressens beaucoup de culpabilité envers mon mari qui ne cesse de me montrer combien il m'adore, alors que mon coeur s'élance sans cesse vers un autre homme.
J'ai interrompu notre discussion au sujet du comportement abusif de mon amant, bien que ce soit exactement ce qui rend cette relation très malsaine, parce que je voulais vous avouer très honnêtement que j'avais succombé...
J'ai si peur de ce qui va m'arriver. De ce que je risque en n'agissant pas rapidement.
Héléna, vous m'avez demandé ce que j'avais ressenti lorsque mon amant m'avait traitée de prostituée.
D’abord, on ne m’avait jamais regardée de la sorte. J’ai toujours adoré les vêtements sophistiqués, les beaux imprimés très féminins, la lingerie féminine et les accessoires coquets. On me regardait plus souvent avec attendrissement, comme on regarde une jeune fille, plutôt que comme une femme fatale. Alors, lorsque Firouz m’a traitée de la sorte, il détruisit l’image que mon entourage reflétait de ma personne jusqu’à ce jour. De la "petite fille coquette", je passais au rang des femmes que l’on regarde comme des objets. Oui, je voulais lui plaire et je m’étais habillée d’une robe ajustée, de bas de nylon soyeux et de petites sandales. Mais, j’étais loin de penser que j’aurais l’air d’une prostituée ou d’une femme voulant provoquer l’attirance des hommes. D’ailleurs, je ne m’en croyais pas capable. C’est à cette époque que je commençai à expliquer ce genre de remarques de la part de Firouz par sa jalousie extrême. Comme il me trouvait attirante ce jour-là, il a dû s’imaginer que tous les hommes me regardaient et, d’une manière, il devait m’en vouloir d’attirer leurs regards et il m’offensa pour exprimer sa jalousie. Je ne le justifie pas; j’essaie simplement de comprendre.
Vous me faites m’interroger sur mon enfance qui, d’après moi, s’est passé d’une manière très banale. Par contre, j’ai toujours souffert de beaucoup d’anxiété, de cauchemars atroces (durant mon enfance) et d’hypersensibilité. Je me souviens, entre autres, de deux choses que je n’ai jamais pu vraiment m’expliquer.
Je me souviens d’un rêve qui me revenait très souvent étant jeune: Je rêvais de Bobino et de Bobinette. Dans mon rêve, j’étranglais Bobinette. Je ne sais pourquoi je le faisais. Quelquefois, elle symbolisait une personne plus âgée
L’autre chose qui me terrifia de moi-même est que je jouais avec une poupée qui ressemblait à une Barbie, mais qui était 10 fois plus grande. Elle avait de très beaux cheveux bruns longs et avait un très beau corps proportionné. Ma mère me l’avait acheté car elle disait que je lui ressemblerais dans quelques années. J’avais à peu près 12 ans. Je m’enfermais dans ma chambre. Puis, je parlais à ma poupée d’une manière autoritaire en lui liant les poignets et les pieds et en la baîllonnant. Puis, une fois le ligotage terminé, je lâchais ma poupée de terreur en m’étonnant moi-même de ce jeu. Je me souviens que durant mon enfance, je devenais hystérique chaque fois que quelqu’un m’immobilisait physiquement.
Puis, adolescente, j’avais un fantasme qui en est encore un, et que je revivais souvent le soir avant de m’endormir. J’étais kidnappée et l’homme me gardais prisonnière dans une chambre, vêtue d’une très jolie robe longue, extrêmement seyante, les pieds et les mains liés. J’attendais que mon "amant" (pas Firouz) vienne me sauver. Aucun acte sexuel n’était commis dans ce fantasme. Je n’ai jamais parlé de ce fantasme ou de la poupée à qui que ce soit.
Héléna, je me rappelle aussi de la période de mon adolescence où j’ai gardé des enfants de tous âges. J’étais vraiment habile avec eux et je me plaisais de jouer à la mère. Je me rappelle qu’un jour que je gardais un bébé, je suis entrée dans sa chambre pour m’assurer que le bébé dormait bien et qu’il était au sec. Je n’avais pas approché le lit que je me mis à visualiser un bébé de quelques mois qui se faisait frappé sur les fesses d’une force assez forte pour le saisir et le faire pleurer. Je sortis de la chambre avant de m’être approchée du lit, le souffle court. Je n’acceptai plus jamais de garder ce petit bébé.
Je ne sais pourquoi je vous dis toutes ces choses, si ce n’est que pour faire remonter à la surface toutes ces pensées qui m’ont tourmentées pendant des années.
Peut-être n’y a-t-il rien à comprendre et que je devrais renflouer tout mon vécu dans mon fort intérieur et me tourner vers un futur dans lequel j’exigerai le respect de ma personne
Enfin, je vous serais fort reconnaissante si vous me faites vos commentaires sur ce que vous avez lu dans mon message.
Héléna, vous êtes pour moi telle une perche qu’on me tend pour me sauver d’une noyade imminente juste en me donnant la chance de m’exprimer sur des sujets qui autrement ne seraient pas abordables dans un autre contexte.
En toute sincérité,
Anam Cara