Bonjour Héléna,
Le paysage que vous me décrivez dans votre message est si paisible et si serein. L’endroit idéal pour se ressourcer et pouvoir enfin entendre la petite voix intérieure à peine audible dans le chaos de la vie quotidienne. Si vous vous trouvez dans un tel endroit présentement, je suis heureuse pour vous
Je vous suis très reconnaissante de me dire en toute franchise ce que vous avez déduit de mes propos en me donnant votre impression de Firouz. En effet, je m’avoue que malheureusement il est malsain et il est incapable d’ouvrir son coeur et de recevoir l’amour que j’ai déversé dans sa vie de toutes les manières possibles.
Je suis idéaliste et ça aussi je le sais. Je ne m’avoue pas vaincue facilement et tant que je vois briller une pointe d’espoir ou une lueur au bout du tunnel, je persiste à essayer d’aller à contre-courant. Or, même lorsque Firouz devenait hostile, je me rappelais sans cesse les moments où il me démontrait son amour et je persistais à essayer de le calmer en ignorant les blessures émotionnelles et l’atteinte à ma dignité et mon respect pour le calmer et l’entendre dire quelque chose qui me rassurerait. Cela me rendait à bout de souffle à chaque fois.
Oui, j’ai cru qu’en vivant ensemble, il serait totalement rassuré et contenté et cesserait de me déséquilibrer et me vouerait un amour inconditionnel. Mais, je sais que je me méprends sur sa vraie nature. Comme c’est difficile d’accepter la défaite lorsqu’on a tout essayé et qu’on n’a jamais voulu abandonner. Mon coeur de petite fille veut lui crier: " Mais pourquoi ne réalises-tu pas la chance que tu as d’être aimé à ce point ? À ta place je tomberais sur les genoux de gratitude devant une femme qui ne t’as pas laissé tomber, même lorsque tu avais abandonné et je lui rendrais au centuple simplement en la chérissant et en contribuant à son bonheur…" Mais, je sais que cela tomberait dans l’oreille d’un sourd. Je le sais, parce que je l’ai essayé.
Ce qu’il m’apporte ? Quelle étrange sensation cela me donne en y songeant. Car, je réalise que je suis constamment en train de donner du meilleur de moi-même en souhaitant toujours être aimée et chérie en retour. Mais, je reste toujours sur ma faim et je continue donc de déployer toutes mes énergies pour le faire réagir. Donc, j’ai appris à être déçue de voir mes attentes non rencontrées, sauf lorsque je m’en attends le moins. J’en serais incapable à cause de mon besoin de spontanéité, mais je crois que je serais arrivée à avoir de bons rapports avec lui en le laissant toujours venir vers moi et en cachant ma vulnérabilité et mon besoin d’être reçue à bras ouverts. Donc, ce serait de renier qui je suis vraiment.
Dernièrement, il m’a demandée ce que j’attendais de lui. Une question qui démontrait de l’empathie et qui m’a fait très chaud au coeur. Sur quoi je lui répondis: un amour inconditionnel, une confiance en qui je suis, de la patience, de la compréhension, bref tout ce qui constitue les ingrédients principaux pour une bonne entente et pour favoriser notre plein épanouissement. Je lui dit aussi que mon bonheur dépendait en grande partie de notre bonne entente. Sur quoi il me répondit que mon bonheur m’appartenait et que tant et aussi longtemps que je partageais le lit avec un autre homme, il ne pouvait être responsable de mon bonheur. Il me dit aussi que rien ne pouvait être inconditionnel, ni même son amour, car je devais aussi rencontrer ses attentes. Un cercle vicieux d’où je ne suis jamais sortie. Je me sentais comme un cheval affamé que l’on fait courir en lui pendant une carotte au bout du museau.
Héléna, je m’avoue vaincue comme dans une partie d’échec où il n’y pas de gagnant ou de perdant et on décide tout bêtement d’abandonner la partie au bout de longues heures, à bout de souffle et d’endurance.
Je me réveille aujourd’hui et je m’aperçois que je n’ai aucun mérite dans ma vie, même pas celui d’avoir mené une vie décente. Même pas celui de ne pas avoir trahi la confiance d’un homme qui ne m’a jamais laissé tomber. Même pas celui de n’avoir jamais ignoré mes propres principes. Même pas celui d’avoir inspiré et exigé le respect de mon entourage. Même pas celui d’avoir contribué positivement dans la vie d’une autre personne. Car d’un côté, j’ai encouragé un homme abuseur en devenant sa victime et de l’autre j’ai trahi la confiance d’un homme qui a osé réapprendre à me faire confiance après avoir appris que je lui avais été infidèle pendant plus de sept ans.
Je me déteste, Héléna, et je crois que je mérite Firouz pour cela, et que mon mari mérite une femme forte et loyale. Je voudrais tellement me libérer de tout cela et simplement partir au loin.
Pour l’instant, je vais suivre votre conseil et prendre mon temps, tout en lâchant prise pour un moment.
Vous me demandez de parler de mon enfance qui, à vrai dire, ne m’inspire pas du tout. Je vais tout de même y penser et vous revenir là-dessus, si vous me le permettez.
Avec toute ma gratitude pour votre intérêt et votre support,
Anam Cara