Chère ..........,
Je ne sais pas si je serai capable de lire longtemps ce que tu écris, parce que c'est douloureux.
Par où commencer?
Je vais prendre tes paragraphes un à un.
"...la femme à qui tu fais des enfants et ces enfants eux-mêmes, tu les as apprivoisés, tu leur a demandé de croire en ton amour, tu les a laissé croire en ton amour, sans condition ..."
C'est vrai! C'est ce que j'ai fait. Et tu sais quoi, c'est encore ce que je fais. Pas ma femme, mais mes enfants, oui. Je ne suis pas aveugle. Je sais bien que mon absence crée un vide. Mais lorsqu'ils partiront, mes enfants créerons aussi un vide. Je n'essaie pas de ma cacher ou me justifier. J'essaie seulement de trouver une réponse acceptable. Il n'y en a peut-être pas, selon toi.
"...Je crois que c'est pire que la mort. Je n'aurais jamais imaginé que cela provoque de tels sentiments d'abandon et de tristesse ..."
Ma femme a perdu sa mère alors qu'elle était en pré-adolescence. Il y a donc une trentaine d'années ce cela. Et tu sais quoi? Elle ne s'en est pas tout à fait remise. Et tu sais pourquoi? Parce qu'elle n'a pas réellement vécu son deuil. Tu sais, dans les dernières années de notre vie commune, la seule peine qu'elle avait et qui me mettait tout à l'envers, c'était lorsqu'elle me disait: "Ma mère me manque tellement". C'était tout à fait déchirant. Combien aurait-elle donné pour pouvoir lui parler ne serait-ce qu'une seule fois encore. Alors je t'en supplie. Ne viens pas me dire que la séparation c'est pire que la mort. Moi, mes enfants peuvent toujours me parler.
"...retrouver sa vie de célibataire sans engagement, sans responsabilités..."
Peut-être ton mari agit-il ainsi, mais côté responsabilités, je n'approuve pas tes propos. Non. Je ne fais plus partie de leur quotidien... je ne le sais que trop. Mais cela ne m'empêche pas de continuer à être leur père et à être leur conseiller... lorsqu'ils ont besoin de mon soutien. Et cela, ils continuerons à le faire lorsqu'ils seront autonomes. Non mais. Fais-leur donc confiance à tes enfants! Vont-ils toujours être à la maison à se morfondre du départ de leur père? S'il y a des questions que tu juges pertinentes pour que leur père intervienne, n'hésite pas. Dis-le leur.
"...Mais je suis restée près de mon mari et j'ai affronté avec lui ses peurs, ses craintes, sa souffrance. Et nous nous avons grandit dans cet amour. ..."
J'ai fait la même chose. Je n'ai fait que ça. Mais on dirait que ce n'était pas assez. Je ne veux pas comparer la situation de ton mari avec la mienne, parce que je crois qu'ils y a des différences, mais qu'en était-il de mes propres souffrances? Oh bien sûr! Ma femme m'a soutenu, épaulé, consolé... mais en ce qui a trait à notre amour, à notre vie de couple, son implication émotive était trop grande pour qu'elle puisse m'aider. J'essaie de te faire comprendre que je n'ai pas jetté la serviette au premier pépin venu. Des pépins, il y en a eu tout au long de notre vie commune. On les réglait un à un, parfois quelques uns à la fois. Mais un jour, il y a plus de dix ans de cela, alors que j'étais toujours follement amoureux d'elle, je le lui ai dit... que j'étais follement amoureux d'elle. Elle m'a répondu que ce n'était pas son cas. Elle m'aimait, certes, mais pas de la même manière. J'étais son meilleur ami, son confident. J'aurais tellement aimé être son amant aussi! Aujourd'hui, non seulement suis-je l'amant de ma nouvelle compagne, mais en plus, je suis son ami, son confident. Et de son côté, c'est la même chose.
"...Aujourd'hui, il lui arrive la même chose et il choisit de me tourner les talons, sans se remettre en question, sans même vouloir y réfléchir alors que je suis dans un moment où c'est moi qui ait besoin de son soutien..."
Là, je vais m'oublier quelques secondes.
C'est vrai que ce doit être dur à avaler. Si tu as été dévouée pendant tant d'années et que lorsque tu voudrais qu'il se dévoue à son tour, tout ce qu'il réussit à faire, c'est de tourner les talons, que tu te sentes trahie, je le comprends. Et il n'y a rien à essayer de justifier là-dedans. Tant qu'il a vu en toi la femme forte, la protectrice, il s'est senti comblé. Alors que pour une fois il aurait pu être fort à son tour, il s'en sent incapable. Ou encore, il ne voit plus l'avantage d'être avec toi. Ça, c'est mon analyse froide de la situation. J'espère me tromper.
"...Je déplore que chacun se déculpabilise de cette "pseudo-solution" qu'est souvent le divorce en se disant "d'autres sont passés par là et s'en sont sortis alors ma famille s'en sortira" et que ce soit le prétexte pour ne pas aller au fond des choses, au bout de soi-même..."
Peut-être est-ce ce que ton mari dit ou pense. Si c'est le cas, j'en suis peiné pour toi. Mais je te le dis humblement. Je ne le crois pas... pas pour moi, en tout cas. Il me semble être allé au fond des choses... je me suis rendu au bout de moi-même... et tu sais quoi? J'en étais rendu tellement loin, que je me laissais dépérir... je me laissais aller. Je vais crever à 55 ans... pis après... mes enfants seront grands, élevés, indépendants. J'aurai fait mon devoir de père jusqu'au bout. Et j'aurai été loyal envers ma femme jusqu'à ma mort. Non mais, c'est-y pas beau ça? À en brailler! Aujourd'hui, j'ai envie de vivre vieux. J'ai perdu 30 livres en un claquement de doigts et ce, seulement en mangeant mieux. Ma femme rage de me voir ainsi. Pourquoi n'a-t-il pas agi ainsi alors que nous étions ensemble? Voilà la question. La réponse, c'est que je n'en avais pas le goût... plus le goût. Si aujourd'hui j'en ai envie, c'est seulement parce que je trouve que j'en vaut la peine. Tu sais, cette dernière phrase est facile à écrire, facile à dire, mais tellement difficile à croire! Quand tu as passé tant de temps à trouver que tu n'en vaut pas la peine, tu finis par le croire. Bien sûr, je suis resté fort. J'ai caché cette douleur au plus profond de moi. Rien de mieux qu'un bon match de football ou une bonne course de Formule 1 à la télé pour remiser la douleur quelque part. Mais elle ressortait. Maintenant, elle sort. Et parfois, je ne suis pas très beau à voir. Parfois même, ma compagne croit que c'est elle qui me cause cette douleur. Je lui dis alors que non. Ma douleur est en train de sortir. Il faut qu'elle sorte.
Donc. Si le divorce avait été la facilité, je n'aurais pas essayé pendant toutes ces années de régler les problème d'estime de soi de ma femme. Je ne le pouvais pas, de toutes manières. Oui, je l'ai apprivoisée... oui elle m'a apprivoisé. Mais elle ne s'est jamais apprivoisée elle-même. C'est la base de l'amour dis-tu? Tu as parfaitement raison. Je lui souhaite de s'apprivoiser un jour.
"...Ce n'est pas de certitude dont j'ai besoin, j'ai le goût de vivre un amour véritable, inconditionnel, mature et généreux et surtout une relation où l'amour sera partagé et entier..."
M O I A U S S I ! ! !
"...Je m'en remets à Dieu car je suis croyante alors je Lui dis : dis-moi ce que tu veux de moi maintenant..."
Tu me disais l'autre jour que Dieu ou la Vie...
Personellement, je ne suis pas croyant... mais je crois en la vie. Alors peut-être suis-je croyant après tout.
Ce que la Vie veut de toi... je ne suis pas Dieu... mais je crois que tu l'as dit juste un peu plus haut: "Je souhaite les vivre avec amour, en m'ouvrant pour en recevoir et en donnant ce que je peux autour de moi."
Si tu crois en Dieu, tu crois aussi ;a la résurection. Alors s'il y a quelque chose de mort en toi, peut-être que ça va rescusciter?
Je te le souhaite du plus profond de mon coeur.