Des passionnés de maths, effectivement, j'en ai connu : quand on aime vraiment ça, c'est une passion qui en vaut une autre. Mais moi aussi j'ai déjà été fascinée par des concepts mathématiques : j'ai fini avec 6 en terminale dans cette matière, mais ça ne m'empêchait pas de lire des livres scientifiques à côté, ce qui faisait enrager ma mère . Elle se disait que je le faisais exprès pour la mettre en rogne! Un jour j'ai lu un livre sur les motifs fractals, ça me passionnait je ne pouvais pas m'en décoller, mais le lendemain je pouvais très bien me ramasser une gamelle pas possible en interro. Les profs ne me comprenaient pas, mes parents non plus. Ils me prenaient pour la reine des paresseuses et des indifférentes. J'avais des remarques atroces sur mon bulletin, et on m'a fait comprendre que je pouvais mettre une croix sur mes ambitions, quelles qu'elles soient...Depuis, je végète plus ou moins, je tourne en rond, j'essaie un domaine d'études après l'autre mais je n'accroche jamais. Quelque chose s'est définitivement cassé en moi, je crois.
Les capacités intellectuelles, c'est une ressource, un outil. Mais posséder une ressource et ne pas y avoir accès, avoir un outil et ne pas savoir pour quoi l'utiliser, est-ce un avantage ? Est-ce que cela ne rend pas encore plus amer et désabusé ? Je ne sais pas si tu as eu droit à des reproches et à des :"tu aurais pu...", mais moi oui, hélas. Qu'y répondre ? Comment ne pas se sentir coupable ?
Moi aussi j'étais très repliée sur moi-même, je réduisais les contacts avec les autres au minimum vital, vraiment ce à quoi je ne pouvais pas échapper. J'avais vraiment des traits de personnalité schizoïde, et bon, je n'ai pas été jusqu'à le vérifier dans le DSM 4, mais peut être même que je l'étais vraiment. J'étais toujours en train de planer, j'évitais les autres autant que possible, je détestais les lieux publics et j'évitais de m'y rendre. Je n'avais ni amour ni amitié et je m'en passais très bien. Je vivais dans mon univers à moi, fait de fantasmes et de visions irréalistes. Mais sans ces traits de personnalité (que j'avais déjà un peu dès l'âge de 3 ans), je n'aurais peut-être pas résisté. Scolairement, si je m'en suis à peu près sortie, c'est à cause d'un état d'esprit un peu spécial : pendant les cours, je planais, je regardais par la fenêtre et je m'ennuyais colossalement, mais, j'ignore comment, j'enregistrais quand même. Il fallait que je comprenne, c'était une priorité absolue. Même en n'écoutant pas, même en ne travaillant pas, même en bâclant devoirs et exercices. Bien sûr, on ne tient pas éternellement, surtout dans certaines matières comme les maths. Au début, on ne perçoit rien, puis les lacunes s'accumulent, elles se renforcent, l'édifice se lézarde de plus en plus, et un jour, brutalement, il s'effondre à la surprise générale. Adieu la réussite...
Maintenant, je suis tout de même inadaptée à cette société. J'ai essayé de donner le change aussi longtemps que j'ai pu. Peine perdue...
Qu'est ce qui me faisait rêver, avant, il y a logtemps ? Eh bien, ne sois pas déçue, mais c'est banal. Lorsque je voyais deux personnes vivre une relation amoureuse, je rêvais de le connaître aussi. Je pensais que mes études me seraient utiles, et je rêvais de pouvoir exercer une profession qui me comble et où je me sente utile et valorisée, de pouvoir enrichir men esprit, grandir en sagesse. Je rêvais que les autres me respectent et m'apprécient. Je rêvais d'avoir un groupe d'amis avec lesquels pouvoir m'amuser parfois, et ne plus connaître la solitude. Je rêvais aussi que le monde s'améliore, que la société s'adapte à l'homme et non plus l'homme, de gré ou de force, à la société, que chaque individu puisse grandir et s'épanouir, et que cesse, ou tout au moins diminue, le gâchis humain qui est fait sur cette planète. Banal, oui...Mais cela valait tout de même mieux que rien.
Quelquefois j'y crois toujours, mais c'est flou, tellement flou. Loin. Inaccessible. Utopique. Et toi, que t'en reste-t-il ?