Dans de nombreux cas, les mécanismes biologiques qui sous-tendent la douleur chronique sont inconnus, et le recours à des interventions médicales (par exemple, l'utilisation d'analgésiques, la chirurgie) pourrait ne pas être bénéfique, soulignent Mary A. Driscoll de l'Université Yale et ses collègues (1).
Dans des conditions telles que la fibromyalgie ou la lombalgie non spécifique, la douleur chronique peut être conçue comme une maladie en soi, expliquent-ils. Autrement, elle est généralement considérée comme un symptôme d'une affection sous-jacente. (Trois types de douleur chronique selon les mécanismes qui les causent)
Driscoll et ses collègues (1) se basent sur le modèle biopsychosocial de la douleur chronique. Proposé en 1978 par Engel, ce modèle souligne l'interdépendance des facteurs biologiques (par ex., lésions tissulaires, santé physique, vulnérabilités génétiques), des facteurs psychologiques (par ex., attention, attitudes, catastrophisme) et des facteurs sociaux (par ex., influences culturelles, apprentissage social).
Ils énumèrent une série de facteurs, jouant un rôle dans l'apparition, le maintien et l'exacerbation de la douleur chronique, sur lesquels les interventions psychologiques peuvent agir.
Traitements psychologiques
Ils décrivent les interventions psychologiques les plus largement acceptées. Pour chacune, ils discutent des théories et des mécanismes sous-jacents, examinent les données probantes et les résultats attendus (p. ex. réduction de l'utilisation des analgésiques, effets sur l'humeur, réduction de la détresse…).
Les interventions examinées sont les suivantes :
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Psychothérapie de soutien
Met l'accent sur l'acceptation inconditionnelle et la compréhension empathique.
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Entraînement à la relaxation
Utilise la respiration, la relaxation musculaire et l'imagerie visuelle pour contrer la réponse du corps au stress.
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Biofeedback
Utilise un équipement de biofeedback pour surveiller les réponses physiologiques au stress et à la douleur (par exemple, le rythme cardiaque, la transpiration) et enseigne comment réguler à la baisse les réponses physiologiques du corps.
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Consiste en une suggestion hypnotique du clinicien pour réduire la douleur et intègre un entraînement à la relaxation.
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Thérapie comportementale opérante
Cherche à remplacer les comportements inadaptés correspondant au rôle de « malade » par des comportements plus sains correspondant au rôle de « bien portant ».
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Thérapie cognitivo-comportementale
Identifie et cherche à modifier les pensées mésadaptées concernant la douleur qui provoquent de la détresse et des comportements inutiles, comme l'isolement et le repli sur soi ; encourage le développement de stratégies comportementales utiles pour faire face à la situation (par exemple, la relaxation). (Psychothérapie du courant cognitivo-comportemental pour la douleur chronique : actualités)
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Thérapie d'acceptation et d'engagement
Encourage l'acceptation de la douleur chronique et se concentre sur les stratégies d'identification et de renforcement des comportements cohérents avec les objectifs souhaités.
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Interventions basées sur la pleine conscience
Vise à dissocier la douleur physique de la douleur émotionnelle par une prise de conscience accrue du corps, de la respiration et de l'activité.
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Thérapie par la conscience et l'expression des émotions
Met en évidence l'interconnexion des régions du cerveau responsables du traitement de la douleur physique et des émotions ; encourage la confrontation des émotions évitées pour réduire le lien entre les émotions et la douleur.
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Physiothérapie psychologiquement informée
Intègre la thérapie physique et la thérapie cognitivo-comportementale.
Pour une description plus détaillée de certaines de ces interventions, voyez :
Cinq types de psychothérapies pour la gestion de la douleur chronique.
Soins intégrés de la douleur
En 2016, le ministère américain de la Santé et des Services sociaux a publié sa « stratégie nationale contre la douleur » qui mettait en évidence les insuffisances et les lacunes des approches actuelles des soins de la douleur chronique, souvent limitées aux médicaments ou aux procédures médicales invasives.
Pour combler ces lacunes, et conformément au modèle biopsychosocial, la stratégie recommandait « un traitement intégré, fondé sur des données probantes, centré sur le patient, multimodal et interdisciplinaire comme norme de soins de la douleur chronique
». Elle définissait les soins intégrés de la douleur comme étant « la coordination systématique des aspects médicaux, psychologiques et sociaux des soins de santé ».
Dans un commentaire accompagnant l'article, Beth D. Darnall (Université de Stanford) soutient que les traitements psychologiques devraient être des traitements de première ligne, appliqués tôt, et pas seulement recommandés après l'échec des traitements pharmacologiques et/ou physiques.
De plus, « plutôt que de décrire le traitement psychologique comme des “compétences d'adaptation à la douleur”, ce que les patients entendent comme “apprendre à faire face à la douleur”, le traitement psychologique peut être décrit plus précisément comme réduisant directement l'intensité de la douleur et orientant favorablement le système nerveux vers le soulagement », écrit-elle. Mme Darnall souligne également la nécessité de comprendre l'hétérogénéité de la douleur, les avantages des approches centrées sur le patient.
Il est à noter que le modèle biopsychosocial n'implique pas que l'origine ou la cause de la douleur chronique puisse être psychologique (psychosomatique) ; la douleur est définitivement d'origine biologique, soulignent des chercheurs : Diagnostiquer les douleurs et maladies comme étant d'origine psychologique est non fondé et dépassé.
Pour plus d'informations, voyez les liens plus bas.
(1) Robert R. Edwards, William C. Becker, Ted J. Kaptchuk, Robert D. Kerns.
Psychomédia avec sources : Association for Psychologial Science, Psychological Science in the Public Interest, Psychological Science in the Public Interest.
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