Bonjour Heidi,
J’ai été contente que tu t’intéresses à mon histoire et m’apportes ton avis. Si je raisonne (et c’est plutôt mon point fort) tous les avis m’importent et m’intéressent. Ils m’aident à faire la part des choses et à me situer le plus objectivement possible.
Domino m’écrit exactement les mots dont j’ai besoin dans la situation actuelle, étant entendu que j’ai délibérément choisi le camp de l’optimisme et de la détermination. Il semble voir les choses à ma façon et être conscient du fait qu’on ne gagne pas ce qui nous tient à cœur en étant défaitiste et pessimiste. Mais tu n’es pas la première à me renvoyer un écho moins favorable et cela me permet aussi de ne pas me laisser entraîner (par moi-même) dans un rêve qui ne serait pas la réalité.
Alors voilà : je ne te reçois pas du tout comme la méchante. Je ressens que mon histoire t’a donné envie de réagir, que tu m’exprimes ce que tu penses ou crois.
Premièrement, ce que tu as vécu avec ton conjoint est, bien entendu, tout à fait ce que je rêvais de vivre dès le départ. J’aurais aimé que ça se passe comme ça : un amour tellement intense qu’il balaierait tout sur son passage.
Mais c’est un rêve d’adolescente qui ne tenait aucun compte des personnalités en jeu (la sienne en l’occurrence).
Ce que ton conjoint a fait lui a, d’accord, fait perdre beaucoup. Mais il faut comprendre que s’il a été capable de le faire c’est que cela correspondait à sa personnalité. Cela a forcément été moins difficile pour lui que ça ne l’est pour d’autres.
Moi j’ai un peu ce tempérament-là. Je pourrais tout plaquer du jour au lendemain par amour. Mais l’homme que j’aime est fait différemment.
Pourtant Heidi, tu sais, je ne vois pas autour de moi de relation aussi intense que la nôtre, je ne conçois pas plus fort, je n’ai jamais de ma vie été aimée avec autant de passion, il a fait pour moi des choses magnifiques. Et tout ça c’est l’homme qui me fait fondre et éveille tous mes vieux rêves.
Je ne suis pas comme lui. Je te l’écrivais plus haut. Avant de le connaître je t’aurais dit (écrit) que le simple fait qu’un homme dans sa situation ne bouge pas était suffisant pour en conclure que son amour n’était pas si fort, qu’en fait tout était simple et qu’il suffisait de s’éloigner ; que s’il était vraiment en amour il réagirait.
Cette relation-là m’a appris énormément, et en particulier qu’il ne faut pas jauger les autres à travers soi. J’ai des forces qu’il n’a pas mais il en a bien sûr que je n’ai pas. L’homme que j’aime, lui, trouverait difficile à accepter qu’un homme abandonne son enfant nouveau-né même par très grand amour. Il trouverait plus normal de sacrifier son bonheur que de sacrifier son enfant.
Vois bien que je me contente de te dire que tout est une question de perception.
Pour te répondre plus précisément, oui, j’ai été malheureuse souvent. Et j’ai aussi eu des moments de bonheur brut. J’ai fait de toute façon mes propres choix. C’est vrai, c’est très vrai que j’ai touché le fond, que j’ai parfois rêvé d’en mourir, pleuré pendant des heures… C’est vrai et je n’ai rien d’autre à dire là-dessus. Je ne peux pas le nier.
Une chose m’a un peu fait sursauter dans tes mots : non, je ne lui donne pas d’excuses. Je le regarde et le vois tel qu’il est, l’homme que j’aime, avec ses forces et ses faiblesses. Il m’est arrivé de le maudire quand j’avais trop mal. Mais on n’aime pas quelqu’un pour sa perfection n’est-ce pas ? On n’exige pas de quelqu’un qu’il réponde à tel et tel critère pour déterminer la dose d’amour qu’on lui accorde.
Les premier mois de notre relation je me demandais bien, effectivement, si je pourrais à long terme aimer quelqu’un qui n’avait pas le courage de nous. Je me voyais, sous le coup de la douleur ou du chagrin, perdre toute estime et tout respect pour lui, sans espoir de retour. J’ai saisi en bout de ligne que l’amour n’était pas un contrat, un test. J’ai saisi que si j’avais à prendre la décision de le quitter je ne cesserais pas de l’aimer pour autant.
Il n’a pas rencontré cette femme en même temps que moi. Il la connaissait depuis des années. Elle l’avait espéré longtemps, il avait cassé plusieurs fois avec elle pour différentes raisons et finalement il s’est fait à l’idée de refaire sa vie avec elle. Leurs enfants respectifs, leurs familles se connaissaient quand elle a finalement emménagé dans sa maison. Par contre on s’est connu alors qu’elle venait d’arriver chez lui.
Cet homme tel qu’il est, avec ses faiblesses, est aussi l’homme le plus délicat, le plus gentil, le plus attentionné, le plus émotif et sensible que j’aie rencontré. C’est un artiste dans toute sa force et les morceaux qu’il compose le disent si bien !
Il a été question que je parle à sa conjointe (il en est peut-être encore question) parce que nous nous aimons, que le problème qui se présente est celui de notre couple et qu’il éprouve tellement de difficultés alors que je ne serais pas arrêtée. Je vois ceci comme un arrangement entre lui et moi : il faut qu’on s’en sorte.
Tenace, oui, je le suis. Ma force jusqu’ici a été son amour, tout simplement. Et aussi le mien bien entendu. Il n’y a rien à admirer. C’est sans doute plus facile pour moi que ça ne l’aurait été pour toi et tu réussirais des choses que je ne pourrais pas envisager. Je suis combative et je ne sais pas abandonner ; comme ton conjoint peut-être.
Rassure-toi tu ne m’as pas fait mal. Pas une fois. Et depuis plus de deux ans que tout cela a commencé j’ai entendu ou lu des choses bien pires que celles que tu m’écris, comme ma meilleure amie me disant « Il faut te faire une raison, il ne la quittera pas, jamais. C’est à toi de décider si tu es prête à vivre comme ça ou si tu préfères renoncer ».
Mais le monde est plein de gens qui ont perdu leurs rêves pour avoir renoncé trop vite. Ça ne me dit rien de ne vivre que par hasard ou fatalité. Il est ce qui m’est arrivé de plus beau de toute ma vie. Fallait-il que je baisse les bras ?
Je reviens très vite pour la suite,
Amicalement,
Livie