J'ai 28 ans, et je suis angoissé, anxieux depuis l'âge de 13 ans... Ma première crise d'angoisse date de cette époque, où j'ai commencé un processus qui m'amenait à me persuader que j'étais atteint d'une tumeur cérébrale... Vivre cela à 13 ans, c'est sortir d'un coup de l'adolescence et adopter un comportement d'adulte face aux diverses maladies (imaginaires bien sûr) développées; pour ma part, je n'ai jamais fait dans la dentelle, optant pour les cancers divers, maladies cardiaques, leucémies et autres maladies de Hotchkins...
Au fil du temps, je suis devenu un "fin" pathologue, m'étant procuré (grossière erreur) un Larousse des symptômes couplé à une encyclopédie des pathologies; je pense être passé par tous les stades de maladies plus ou moins graves.
Mais jusqu'à il y a quelque mois, je peux dire que j'avais une vie "normale", ponctuée de crises d'angoisses hebdomadaires ou bi-hebdomadaires que je traitais par la consultation d'un médecin généraliste, un diagnostic favorable, et une prise légère de Benzodiazépine (Lexomil, Xanax, Lysanxia...)...
En mars 2003, j'ai été incarcéré à la maison d'arrêt de la Santé à Paris, pour une affaire financière; j'y suis resté 4 mois, durant lesquels j'ai été suivi par une Psychiatre et une Psychologue... Leur ayant parlé de mes crises d'angoisse et de panique (beaucoup plus rares), je me suis vu administrer une rafale "vitaminée" à base de Deroxat et de 4, puis 5 Xanax 0.5 par jour (surdosage !?)
Le résultat est là! Libéré le 6 juillet pour vices de procédure, j'ai décidé de "décrocher" de toute forme de médication... C'est là qu'à commencé la spirale infernale: entre l'arrêt des Benzodiazépine, le choc post-traumatique dû à mon incarcération et à ses conséquences, mon changement de vie et le rejet de certaines personnes de mon entourage, j'ai repris une consommation assidue de Benzos, et je me suis enfoncé dans un état PERMANENT d'angoisse ponctué de crises de panique très violentes à raison d'une ou deux par jour au
mieux; j'éprouve une fatigue permanente, des sensations de vertiges, de mort imminente, et j'entame une phase "d'interdiction" concernant les endroits où certaines de mes crises les plus violentes ont eu lieu (Eglise, rue, banque...); je m'interdis ou j'évite certains endroits de peur de revivre une crise similaire... L'agoraphobie me gagne, et je rentre chez moi un peu comme dans un "refuge"...
Je ne sais pas où tout cela va me mener; sachant que je ne suis pas suicidaire, je pense basculer un jour dans la folie, irrémédiablement (mais ceci fait partie de mes angoisses, bien sûr)... Je perds pieds de jour en jour, et j'essaie de me raccrocher à mes espérances pour vivre "normallement" (ce qui est impossible à ce niveau d'angoisse); ma vie sociale, professionnelle, associative est chamboulée; et je connais la source de cette évolution incroyable de mon état psychologique : c'est la Prison et les conditions dans lesquelles les détenus sont traités; les médicaments (calmants, anti-dépresseurs, somnifères...) assurent à l'administration pénitentiaire française une relative tranquilité dans des prisons surchargées... La Prison n'a fait qu'exacerber mon angoisse et mes crises de panique; le pays des Droits de l'Homme a du soucis à se faire concernant les conditions dans lesquelles les gens sont détenus, criminels ou non, coupables ou innocents...
Je tenais à partager ce témoignage, car même si j'ai commis un délit financier, je pense que j'aurai pû bénéficier d'un suivi adéquat lors de ma sortie de Prison, ce qui aurait été NORMAL; aujourd'hui, je me retrouve face à mes démons, avec des cauchemards récurrents, et une vie vide de toute joie, qui me mène peu à peu à l'abstraction la plus totale de toute forme d'émotion (excepté le stress, l'angoisse et la peur panique)...
Il est temps de prendre conscience que "droguer" les gens est une chose, mais que les aider devrait être un devoir dans un pays qui s'argue d'être en avance sur son temps...
J'espère retrouver un jour "ma vie", celle que j'ai perdu dans une cellule de 9 m2, durant 4 mois, à Paris, capitale de la France...