Réponse à: LOUISE (psychothérapeute maladroite)

Surnom: LOUISE
Pays: France
Âge: 31
Sexe: féminin

Bonsoir,

Abusée sexuellement à l'âge de 9 ans par le grand-père de mes demis soeurs et ayant été traitée de menteuse et vicieuse par mon père lors de mon aveu, j'ai porté ce secret pendant presque vingt ans. Avant d'entamer une thérapie il y a trois ans, j'avais auparavant trouvé un équilibre en écrivant et en lisant Alice Miller. A 27 ans j'ai rencontré une psyco-thérapeute en qui j'ai eu confiance qui travaillait sur l'anamyse transactionnelle. Au reagard de mon passé, j'ai été extrèmement sécurisée par l'affection et l'implication dont elle faisait preuve dans son travail. Dès le début, m'a avoué qu'elle me trouvait brillante et une relation au delà du cadre thérapeutique s'est installée. Elle disait que j'avançais extrèmement rapidement et qu'elle apprenait énormément à mon contact. L'histoire est un peu longue mais bref : je l'ai conseillée à une dizaine de mes relations et je n'ai pas mesuré que cela me faisait souffrir : au fur et à mesure, elle faisait davantage appel à mes "compétences de thérapeute" qu'à ma souffrance de patiente : quand je décrivais une relation, elle ne semblait plus considérer ma souffrance mais me parlait des autres et de leur sytèmes. Parrallèlelement, ces personnes amies ou amis trouvent en moi au quotidien une écoute thérapeutique. La femme de mon père est allée la consulter et je n'ai plus supporté de ne pas pouvoir parler d'elle sans que ma psy m'explique que ce que vivait cette femme était douloureux, qu'elle avait beaucoup maigri, etc. J'ai eu le sentiment de ne plus exister. Je lui ai fait part de mon désaccord et de ma detresse et elle m'a dit qu'il était peut être temps pour moi de changer de thérapeute. Je l'ai très mal vécu et j'ai eu le sentiment que je n'avais pas le droit de luifaire part de ma detresse. Elle a oublié l'écoute affective et m'a rejetée. Bref je ne me sens plus en sécurité avec elle : c'est à moi de la comprendre ! (elle dit par exemple que pour elle, c'est délicat, parceque c'est moi qui lui donne des infos sur des patients avant qu'elle n'en prenne connaissance...j'estime que c'est sa problèmatique. Ma question est : un psy, peut -il avoir pour patients des gens qui sont intimement liés sans qu'il y ait de dérive ? Elle affirme qu'un enfant abusé sexuellement ressent de l'excitation sexuelle : honnêtement il ne me semble pas avoir renié une quelquonque excitation sexuelle. Peut-elle affirmer ça ? Je souffre beaucoup de cette situation.

Merci de m'éclairer.

Selon votre description, votre psychothérapeute aurait commis une demi-douzaine d'entraves à l'éthique professionnelle, laquelle varie, il est vrai, selon les pays.

S'il est acceptable pour une psychothérapeute d'affirmer à sa cliente que celle-ci avance rapidement et qu'elle (la thérapeute) apprend énormément à son contact et s'il est encore acceptable pour la psychothérapeute de recevoir en thérapie des amis et amies de sa cliente, il en va tout autrement lorsque la thérapeute se met à faire appel aux supposées "compétences" (réelles ou imaginaires) de sa cliente pour commenter des choses relatives à ses propres clients.

En votre présence, elle aurait dû, purement et simplement, ignorer et taire tout ce qui se rapporte à ses autres clients (connus ou non de vous, cela n'a rien à voir). Cela s'appelle le secret professionnel et c'est élémentaire.

Votre psychothérapeute, si rien ne l'empêche de recevoir vos amis et collègues de travail en thérapie, n'aurait cependant pas dû recevoir la femme de votre père ni aucun membre de votre famille. Qui plus est, elle a dévoilé, en vous commentant à vous ce que vit une autre de ses clientes, un secret professionnel !

Comme si ce n'était pas assez, elle vous suggère de changer de thérapeute, tout simplement parce que vous lui faites part de votre désaccord ! C'est vraiment surprenant.

Peut-être est-ce délicat pour votre thérapeute d'entendre certaines informations sur ses clients par votre bouche avant d'en prendre connaissance par eux de façon directe. C'est possible, mais c'est son problème à elle et non le vôtre. C'est elle qui s'est placée en situation de conflit d'intérêt et en plus elle vous en fait porter la responsabilité !

Pour être clair, non, un psy ne devrait pas accepter en thérapie des personnes liées intimement à ses clients, et ce indépendamment de l'approche utilisée. La seule exception, c'est la thérapie familiale (et encore ! celle-ci à ses règles d'éthique également).

Je dois préciser que les règles d'éthique qui prévalent dans un pays ne sont pas nécessairement les mêmes ailleurs. Je vous parle à partir du code d'éthique de l'Ordre des psychologues du Québec. Ma réponse doit donc être prise avec une certaine perspective.

Votre thérapeute affirme en dernier qu'un enfant abusé sexuellement ressent de l'excitation sexuelle. C'est une généralisation hâtive. Il peut arriver que certains enfants et dans certains cas, ressentent une excitation génitale et même une certaine forme de plaisir lors d'attouchements ou de contacts sexuels avec un adulte. Ce phénomène est connu mais on n'en parle que très peu. Cette excitation, cette forme de plaisir, est d'ailleurs extrêmement troublante et se trouve à l'origine d'une grande confusion et d'une grande ambiguïté pour l'enfant. C'est probablement là l'origine de certaines dysfonctions dans son développement psycho-affectif et psycho-sexuel ultérieur.

Mais cette situation est loin d'être généralisée. La majorité des enfants victimes d'abus ressentent un mélange d'émotions particulièrement pénibles à vivre, mélange accompagné d'un sentiment très douloureux d'envahissement de leur frontière (physique et psychique). On est loin de l'excitation sexuelle !

Si vous avez perdu confiance en votre psy, il est tout-à-fait approprié de changer.

Bonne chance, Louise !

Georges-Henri Arenstein, Psychologue