Réponse à: ISIDORE (suis-je pédophile ?)

Surnom: ISIDORE
Pays: Belgique
Âge: 47
Sexe: masculin

Elle a maintenant douze ans, elle se prénomme Emilie. J'en ai quarante sept. Quand nous nous sommes connus elle avait trois ans. Elle ne quittait pas mes genous et disait qu'elle était ma "fiancée".Nous avions l'un pour l'autre une attirance à laquelle je n'ai pas, au début, prêté attention. Pour moi, c'était sain et mignon.. Puis, sa maman et moi nous sommes mis ensemble.

Un soir, devant la télévision (ma compagne travaille de nuit) Emilie prit ma main et la posa de manière explicite sur un endroit que notre morale aurait dû réprouver. Puis, de soir en soir, les caresses sont devenues de plus en plus précises. J'ai, certes, depuis pris l'initiative, mais sans jamais établir de rapport de force ou d'autorité entre nous deux. J'ajoute cependant que le "pas décisif et irréversible" n'a jamais été franchi.

Mais elle est en quelque sorte ma fille le jour, et ma "femme" la nuit. Je culpabilise de plus en plus, car j'aime aussi ma compagne. Je ne peux, et pour cause, me confier à personne, je sens enfermé avec mon problème qui me culpabilise.

Les récentes affaires de pédophilie n'ont pas arrangé mon problème. Ce qui ne m'arrange pas, c'est que je sais mon sentiment et mes pulsions partagés. J'ajoute enfin que ne resent aucun intérêt pour les autres jeunes filles.

Je suis dans un pétrin pas possible, sans issue, et dans l'isolement le plus complet...

Je tenais à préciser que la petite Emilie ne paraît souffrir d'aucun désordre psychologique. Elle est gaie, enjouée, et se tient dans les premières places de sa classe. Notre relation est fondée sur le respect mutuel, et je ne lui ai jamais imposé aucun acte contre sa volonté. Elle vit apparemment ce problème bien mieux que moi...

Bonjour Isidore,

Etes-vous pédophile ? Je crains bien que oui. Examinons quelques phrases de votre texte.

Elle avait trois ans et disait qu'elle était votre «fiancée». Je suis très surpris que vous ayez accepté cette «offre» et ce «titre», au lieu de les décliner. Il aurait été approprié de dire : «Hum, je ne crois pas, non. Nous sommes des amis. J'ai déjà une fiancée, et c'est ta mère.» Déjà à cette époque, vous avez commencé à installer «le terrain ».

Vous aviez une attirance mutuelle, c'était sain et mignon, dites-vous. Attention, il y a attirance et attirance ! Son attirance pour vous et la vôtre pour elle ne sauraient être identiques, et encore moins, comparables ! Vos deux niveaux de développement psycho-affectif étant trop différents.

Emilie a posé votre main sur un endroit que notre morale aurait dû réprouver, dites-vous. «Notre» morale ? La morale de qui ? Vous ne pouvez pas comparer sa morale et la vôtre ! Elle a trois ans et vous en aviez près de quarante ! Quant à votre main, elle n'est pas à la merci d'une enfant de trois ans . cette main a suivi docilement le mouvement qu'Émilie lui a donné avec votre plein consentement et votre totale responsabilité. À trois ans, ce n'est certes pas elle qui était responsable. Vous oui. Il eut été possible de dire : «Attention Emilie, je n'aime pas ça», puis de retirer gentiment votre main.

Les caresses sont devenues de plus en plus précises, dites-vous. Les vôtres également, doit-on comprendre. Je suis surpris que vous n'ayez pas pris l'initiative d'arrêter ce jeu dangereux.

Vous n'avez jamais établi de rapport de force ou d'autorité, dites-vous. Quel dommage ! Vous auriez dû. Parce que c'est vous l'adulte. Et c'est à l'adulte à faire preuve d'autorité et à dire non à ces jeux qui sont bien loin d'être innocents. Oseriez-vous dire . qu'elle vous a eu ?

Votre relation est fondée sur le respect mutuel, dites-vous. Oh que non ! Je vois votre abus mais je ne vois pas votre respect. Et ceci fait précisément partie du drame : les pédophiles se jouent des tours à eux-mêmes en se montrant convaincus de faire preuve de respect alors même qu'ils sont dans l'abus flagrant. Laissez-moi vous expliquer, Isidore : quand bien même la fillette vous en redemanderait en suppliant, le respect vous commande de lui dire non. Voilà ce qu'est le respect. Si vous dites oui, c'est que vous avez trois ans.

Emilie ne paraît souffrir d'aucun désordre psychologique, dites-vous. Elle est enjouée et réussit bien à l'école. J'ignorais qu'être enjoué et réussir en classe était un signe d'absence de trouble psychologique . je trouve que vous sautez vite aux conclusions. Émilie est encore pré-adolescente. Ou alors au tout début de son adolescence. Les éventuels désordres peuvent encore survenir. Et ils risquent fort de survenir au moment des premières relations garçons-filles.

Vous êtes dans un pétrin pas possible, dites-vous. C'est le seul point sur lequel je suis d'accord avec vous. Il est encore heureux que vous ne blâmiez pas Emilie pour vous y avoir mis ! J'espère que vous me comprenez bien : j'affirme que vous êtes le seul et unique responsable du pétrin dans lequel vous vous êtes plongé vous-même.

Que faire ? Quittez le domicile le jour-même où vous lisez ces lignes. Pourquoi ? Pour vous soustraire à la tentation, pardi !

Ensuite courez voir un(e) sexologue ou un(e) psychologue pour débuter une psychothérapie.

Et soyez préparé à vous «confesser» à la maman d'Émilie. En effet, cette dernière va l'apprendre tôt ou tard. Préférez-vous que ce soit Émilie qui vous dénonce ou allez-vous prendre les devants ?

Comment se fait-il que vous réagissiez au printemps de l'an 2000 alors que la situation perdure depuis neuf ans ? Émilie vous aurait-elle refusé ? Vous a-t-elle menacé de tout raconter ? Et au fait, comment vous y êtes-vous pris pour acheter son silence ?

Rappelez-vous quand même que, quoi que vous ayez fait, vous pouvez changer de direction. Tout commence aujourd'hui. Mais ça devient urgent !!!

Bonne chance, Isidore !

Georges-Henri Arenstein, Psychologue