Réponse à: BRISÉE (vie brisée et suicide)
Surnom: BRISÉE
Pays: Canada
Âge: 38
Sexe: féminin
Je vais résumé ma vie. Inceste avec un oncle dans l'enfance, Perte de ma mère à 12 ans, placée en famille d'accueil parce que père alcoolique. Mariée à 21 ans avec un bon mari, à la naissance du premier enfant j'apprend que mon père n'est peut-être pas le vrai mais peut-être l'oncle abuseur. Deuxième enfant toujours hospitalisée, plusieurs opérations. A ce moment commence ma première dépression. Thérapie Médicament etc. Deux ans et je m'en suis sortie. Depuis 3 ans j'ai encore vécue beaucoup de stress, le toît de ma maison a été arraché 2 fois par des minis tornades inutile de dire que maintenant le vent me fait énormément peur. Je vis des gros conflits avec la famille paternel. Mon conjoint a fait une crise de coeur etc. Je suis en thérapie depuis 2 ans d'abord pour le vent et on en est venu à parler de L'inceste et c'est là que ça se gâte. Mon thérapeute m'a fait rencontrer des gens d'un centre de victime d'inceste ou de viol j'attend ma place pour une thérapie depuis 3 mois. Depuis que j'en ai parlé avec mon thérapeute j'ai toujours la larme à l'oeil. Je devient de plus en plus dépressive je n'ai plus le goût de rien les éléments de stress continue à rentrer avec la même assiduités et je ne suis plus capable d'en prendre.Je pense beaucoup au suicide tellement que mon plan est tout établi, mon thérapeute le sais, mon médecin aussi. J'ai promis à mon thérapeute que je retardais la date de trois semaines pour laisser une chance aux medicaments de faire leur effet. J'ai commencée il y a 6 semaines. Je dors très peu depuis des mois.Je suis complètement vidée, je n'ai plus le goût de me battre. Mon médecin voulais m'hospitalisé mais il n'en est pas questions. Ca ne me tente pas d'être enfermée en psychiâtrie. J,ai toute ma tête c'est juste que je n'ai plus le courage d'affronter tout ce qui m'arrive je suis écoeurée de toujours avoir à me battre. C'est le seul moyen que j'ai trouvé pour que ça arrête. Les médicament ne font pas leur jobs, le doc me les a changé la semaine passé. Et ça ne me tente plus d'aller au centre pour l'autre Thérapie, je sais que ça va être pire et je n'ai pas la force de passer à travers. Je ne veux pas parler de mon suicide à mon mari car je sais qu'il va capoté à chaque fois que je vais vouloir sortir ou lui ne voudra plus quitter et je ne veux pas vivre comme dans une prison. Aider moi s.v.p.
Bonjour Brisée.
Quelle touchante histoire que la vôtre et quelles horreurs vous avez dû supporter dans votre vie. Comme si le bonheur s'archarnait à vous dire qu'il ne veut pas de vous.
Vous avez vécu un inceste : déjà ça commençait mal pour vous. Le fait d'apprendre que cet individu était peut-être votre père remplissait ensuite la coupe jusqu'au bord. Vous n'aviez vraiment pas besoin d'autre chose. Déjà, ces deux seuls faits suffisaient à eux seuls à vous rendre très fragile et vulnérable. Vos problèmes de santé, votre dépression, les événements stresseurs sont venus faire déborder cette coupe.
Aujourd'hui, vous avez planifié votre suicide car vous vous dites que vous n'en pouvez plus, que vous n'avez plus d'énergie pour surmonter tout ça et que c'est le seul moyen que vous avez trouvé pour que ça arrête. Effectivement, il est très normal de penser au suicide lorsqu'on vit une telle histoire d'horreur. Vous avez bien choisi votre surnom : vous êtes brisée.
En même temps, vous consultez un médecin et un thérapeute et vous nous dites : aidez-moi svp. Comme si une dernière partie de vous luttait désespérément pour croire qu'il y a encore quelque chose à faire. C'est cette partie sans doute qui vous a fait accepter les 3 semaines d'attente avant de mettre votre projet à exécution. C'est cette partie sans doute qui a fait que ça fait maintenant six semaines. C'est aussi cette partie qui vous a fait nous écrire.
C'est à elle aussi que je voudrais m'adresser maintenant.
Avez-vous remarqué que, dans toute cette histoire, vous n'aviez de contrôle sur rien? Votre oncle abuse de vous lorsque vous étiez enfant : vous n'aviez aucun contrôle sur cet oncle. Vous apprenez ensuite qu'il est peut-être votre père : encore là, que pouvez-vous y faire? Rien en fait. Vous êtes malade suite à vos accouchements : il ne reste plus qu'à vous en remettre aux médecins qui vous soignent. Tout cela vous a conduit à une première dépression.
Les éléments naturels se mettent ensuite de la partie : mais qui peut se vanter de contrôler le vent? Et comme si ce n'était pas assez, ce vent arrache non pas une fois, mais deux fois le toit de la maison. Impuissance, absence de contrôle, incapacité de faire quoi que ce soit. Pas étonnant que le vent vous fasse si peur. Le vent est cet élément énorme qui vient quand il veut, qu'on ne peut prévoir et qui prend tout sans le demander à personne. Un vrai oncle abuseur finalement. Et vous n'y pouvez rien.
En fait, Brisée, le seul contrôle qui vous reste est celui de votre vie. Décider de vous tuer ou de rester en vie, c'est une décision qui vous appartient. À vous toute seule. Et je n'ai pas envie de vous l'enlever.
Paradoxalement, il semble que les solutions qui s'offrent à vous soient des solutions dans lesquelles vous allez encore perdre le contrôle : être hospitalisée, vous laisser animer par un groupe de personnes abusées, prendre des anti-dépresseurs Pas très tentantes ces solutions, et pas étonnant que vous ne vous sentiez plus d'énergie pour de telles solutions. On ne peut pas passer sa vie à être sans contrôle. Tout humain a besoin de diriger sa vie.
Pourtant, Brisée, choisir de perdre le contrôle, ce n'est pas comme le perdre réellement. C'est un choix, une décision. C'est le contrôle suprême. Choisir de s'abandonner aux soins hospitaliers, choisir de participer à un groupe de soutien, choisir de les prendre, ces anti-dépresseurs, ce n'est pas comme ne plus avoir de contrôle sur sa vie. C'est au contraire avoir un grand contrôle. Car le contrôle n'est pas dans le fait de se laisser faire ou pas. Il est dans la décision de prendre sa vie en main et d'accepter les solutions qui existent, mêmes si elles ont pour effet, pour un temps, de s'en remettre à d'autres. Ces autres, professionnels, ne seront pas comme le vent qui rafle tout ce que vous avez ou l'oncle qui vous enlève votre vie. Ces professionnels vont prendre soin de vous seulement le temps que vous refassiez vos forces, seulement le temps que vous puissiez, à votre tour, reprendre le contrôle de votre vie, un contrôle que vous avez perdu depuis que vous êtes toute petite et qui vous attend maintenant au c ur de vos idées suicidaires.
Une voix vous dit : laisse-toi aller et meurs.
Une autre vous dit : laisse-toi aller et vis.
Je vous souhaite simplement de ne pas vous laisser aller. Prenez le contrôle de votre vie et choisissez de vivre et de réparer enfin ce qui en vous est « brisé » depuis si longtemps.
Bon courage.
Jean Rochette, Psychologue.
Jean Rochette, Psychologue