Réponse à: ALEX (victimisation et culpabilisation)
Surnom: ALEX
Pays: Canada
Âge: 33
Sexe: féminin
Bonjour
Nous sommes trois filles dans la famille, très rapprochées en âge et très proches dans la vie. Notre problème est notre mère. Seulement en écrivant ces quelques mots, je me sens déjà coupable et vous avez là un bel exemple de ce dont je veux vous parler.
Ma mère et mon père se sont séparés il y a de cela 14 ans. Dès ce moment, mes soeurs et moi sommes devenus les parents de notre mère. Nous l'avons aidé à refaire sa vie, nous l'avons supporté, ce qui, à prime abord, est parfait. Sauf qu'aujourd'hui notre mère se complaît dans son rôle de victime et insconciemment, probablement, nous culpabilise à propos de tout et de rien.
Elle fait toujours pitié, elle ne nous appelle pas sous prétexte d'avoir peur de nous déranger et quand nous l'appelons elle s'arrange pour nous faire sentir coupables de ne pas l'avoir appelé avant. Elle nous avait bien averti qu'elle ne jouerait jamais à la grand-mère parce qu'elle se sentait trop jeune. Résultat: elle ne garde pratiquemment jamais ces 3 petits-enfants, accepte à contrecoeur de nous dépanner quand on est mal prises mais elle a pourtant beaucoup de plaisir avec eux et après nous reproche de ne pas lui demander son aide plus souvent.
Nous habitons toutes très près les unes des autres mais si l'une d'entre nous a le malheur de parler qu'elle songe à s'acheter quelque chose plus loin, c'est le drame! Elle nous fait sentir que nous l'abandonnons mais de l'autre côté nous dit que nous avons nous aussi une vie à vivre.
Finalement il y a beaucoup de non-dits dans tout ça et c'est assez difficile à exprimer en mots. La conclusion c'est que nous sommes malheureuses dans cette relation. On a peur de lui téléphoner parce qu'on sait qu'elle sera nécessairement déprimée ou elle cherchera à nous culpabiliser d'une façon ou d'une autre.Alors entre nous trois nous faisons des tours de garde, c'est chacun notre tour de s'occuper d'elle comme ça on sait qu'on est au moins deux semaines tranquilles sur trois.
C'est assez épouvantable de dire des choses comme celles là de sa mère mais honnêtement ça fait du bien de les verbaliser. je ne sais pas ce que vous penserez de cette lettre, je ne sais même pas si vous pouvez nous aider, nous donner des pistes d'attitudes à adopter avec elle, comment l'aider à devenir une personne plus heureuse, plus sereine, moins aigrie ou si c'est cause perdue.
De toute façon merci d'avoir pris le temps de lire cette longue lettre.
Bonjour Alex,
Vous nous décrivez là une situation assez typique de mère manipulatrice avec ses enfants. Sa personnalité, les circonstances de la vie, ses mécanismes de défense, etc., l'ont amenée à se comporter ainsi avec ses trois filles.
Votre intention de l'aider est très belle et très noble et le fait que vous soyez trois à faire «front commun» est une chance.
Mon impression est que vous aurez à renforcer votre «frontière» psychologique pour être moins vulnérable à ses remarques contradictoires. Il ne s'agit pas de changer votre mère. Il s'agit de changer votre attitude. Exemple, lorsqu'elle vous reproche que vous l'abandonnez si vous envisagez de déménager dans une autre ville, vous pouvez dire : «Oui, tu le vois comme un abandon. Moi je ne le vois pas ainsi». Ce genre de réponse n'est pas attaquant ni blâmant et respecte la frontière des deux interlocuteurs. Si elle vous reproche de ne pas l'avoir appelée avant et que ça la rend déprimée, vous pouvez dire : « C'est dommage que tu le vives ainsi parce que moi j'ai du plaisir à te parler maintenant». Cette attitude (et pas juste les mots) est responsabilisante pour tous.
Je vous invite à essayer cette formule qui devrait contribuer à vous maintenir en position de force sans vous sentir troublée ou coupable. Après tout . vous n'avez rien fait de mal ! En essayant d'accorder moins de pouvoir à son jugement sur vous, vous vous libérez considérablement. Après tout, vous n'êtes plus une petite fille !
Bonnes pensées à vous toutes !
Georges-Henri Arenstein, Psychologue