De nouvelles lignes directrices pour le traitement de la dépendance aux opioïdes ont été publiées, le 5 mars, dans le Canadian Medical Association Journal (CMAJ).
Un groupe de 43 experts (1), dont la Dre Julie Bruneau du Centre hospitalier de l’Université de Montréal, recommande le traitement par agoniste opioïde avec la buprénorphine-naloxone (Suboxone) comme traitement de première intention lorsque c'est possible plutôt que la méthadone, en raison de plusieurs avantages de la buprénorphine, dont un moindre risque de surdose.
Les agonistes opioïdes agissent sur les récepteurs opioïdes du cerveau auxquels se fixent normalement les endorphines, qui sont des opioïdes produits par le corps, ainsi que la morphine et l’héroïne. Ils produisent des effets semblables à ceux des drogues et médicaments opioïdes, mais sans certains effets indésirables.
« Les agonistes contrecarrent les symptômes de sevrage et la sensation de manque tout en permettant au cerveau de fonctionner normalement
», explique la Dre Bruneau relayée par Le Devoir.
« La buprénorphine est un agoniste partiel, c’est-à-dire qu’il a un effet plafond, ce qui fait qu’il est plus difficile de faire une surdose avec ce médicament. Il est donc beaucoup plus sécuritaire que la méthadone
», précise-t-elle.
Quant à la naloxone, antidote utilisé contre les surdoses, elle est un antagoniste qui bloque les récepteurs opioïdes. « Elle a une plus grande affinité pour les récepteurs opioïdes que l’héroïne. Elle déplace donc l’héroïne qui est liée aux récepteurs, et bloque l’effet de l’héroïne, ce qui entraîne le réveil du patient, mais induit les symptômes du sevrage et la sensation de manque
».
« La naloxone a été introduite dans les comprimés de suboxone que l’on met sous la langue pour empêcher les patients de se les injecter. Si la personne prend le suboxone comme il se doit sous sa langue, la naloxone n’aura aucun effet parce qu’elle n’est pas absorbée par les muqueuses. Par contre, si elle l’écrase et se l’injecte, la naloxone exercera son effet antagoniste, et le patient ressentira les symptômes du sevrage
», explique la Dre Bruneau.
« La buprénorphine n’est toutefois pas efficace pour certaines personnes, dont la consommation d’opioïdes est plus importante et plus ancienne. Les lignes directrices recommandent alors d’opter pour la méthadone, un agoniste complet qui fonctionnera mieux chez les consommateurs ayant besoin de grosses doses d’opioïdes
», précise Le Devoir.
« La méthadone est toutefois beaucoup moins sécuritaire. Une dose de méthadone pourrait tuer quelqu’un qui a une faible tolérance. De plus, elle est plus susceptible d’interagir avec d’autres médicaments, tels que des antirétroviraux, des antibiotiques et certains antidépresseurs, et ces interactions peuvent induire des effets secondaires, notamment cardiaques. Au Québec, une exemption est nécessaire pour pouvoir prescrire la méthadone. Elle est administrée en liquide par la bouche devant le pharmacien
», indique la Dre Bruneau.
Les nouvelles lignes directrices appellent aussi à un meilleur accompagnement des patients. « L'accompagnement psychosocial devrait être offert à tous les patients, mais ne devrait pas être une condition obligatoire pour leur donner un médicament
», précise la Dre Bruneau.
Les auteurs soulignent que la gestion de la crise des opioïdes passe également par une bonification des formations offertes aux professionnels de la santé afin de diminuer les prescriptions d'opioïdes, rapporte Radio-Canada.
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(1) Auteurs de l'article : Julie Bruneau, Keith Ahamad, Marie-Ève Goyer, Ginette Poulin, Peter Selby, Benedikt Fischer, T. Cameron Wild et Evan Wood.
Psychomédia avec sources : CMAJ, Le Devoir, Radio-Canada.
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