Les Américains d’origine africaine ont une réponse immunitaire aux infections plus forte que ceux d’ascendance européenne, selon une étude canado-américaine publiée dans la revue Cell.
Luis Barreiro de l’Université de Montréal et ses collègues montrent aussi que ces différences sont pour la plupart d’origine génétique, héritées de nos ancêtres et influencées par la sélection naturelle.
L’étude a été menée avec 175 Américains, dont une moitié était d’origine africaine et l’autre européenne.
Le système immunitaire des Afro-Américains réagit plus fortement, « mais on ne peut pas conclure qu’il est meilleur, car une réponse immunitaire plus forte comporte aussi des effets négatifs, comme une sensibilité plus grande aux maladies inflammatoires auto-immunes, telle la maladie de Crohn. Une inflammation trop forte peut aussi endommager les organes et laisser des séquelles. Bref, une réponse immunitaire forte dans un certain contexte peut être avantageuse, mais inappropriée dans un autre contexte.
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« Le système immunitaire réagit aux infections en provoquant de l’inflammation (rougeur, chaleur, gonflement, etc.) afin de neutraliser et d’éliminer l’infection. Il était déjà connu des scientifiques que les Afro-Américains sont plus sensibles aux maladies inflammatoires auto-immunes, donc plus nombreux à souffrir par exemple de tuberculose ou de sclérodermie.
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« Les 175 participants (...) ont fourni des échantillons de sang desquels ont été extraits des macrophages, qui sont des cellules du système immunitaire dont le rôle est de tuer les pathogènes responsables des infections. L’équipe de recherche a ensuite infecté ces macrophages avec deux sortes de bactéries (listéria et de la salmonelle) afin d’observer les diverses réponses immunitaires: les macrophages des Afro-Américains ont tué trois fois plus vite les bactéries présentes après 24 heures d’infection.
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« L’une de nos hypothèses, explique le chercheur, est que lors de la période préhistorique, après que les populations humaines eurent migré hors de l'Afrique, elles ont été exposées à moins de pathogènes (bactéries, virus, parasites), ce qui a réduit la réponse immunitaire, donc l’inflammation des tissus. Cette réduction de la réponse immunitaire (et de l’inflammation) a probablement été favorisée en raison des conséquences néfastes de l'inflammation aigüe ou chronique, qui sont les principaux contributeurs au développement de maladies inflammatoires auto-immunes.
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« Une autre hypothèse est que la réponse immunitaire plus faible détectée chez les Européens serait le résultat d’un processus de sélection naturelle moins vigoureux dans un environnement où le nombre de pathogènes est réduit ou tout au moins de nature différente que ceux trouvés en Afrique.
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L’homme de Néandertal, disparu il y a 30 000 ans, « a aussi son rôle à jouer dans la réponse immunitaire aux infections. Le Néandertal, avant de disparaître, a colonisé l’Europe, mais pas l’Afrique. Il a donc mélangé ses gènes avec l’homme de Cro-Magnon africain disséminé en Europe. L’analyse de l’équipe de Luis Barreiro démontre qu’environ 3 % des gènes impliqués dans la différence de réponse immunitaire entre les Afro-Américains et les Euro-Américains proviennent de l’homme de Néandertal !
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Psychomédia avec sources : Université de Montréal, Cell.
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