Je suis en arrêt de travail depuis maintenant un mois et demi. Par un lundi bien ordinaire, mon client chez qui je travaillais depuis un an me demanda si j’avais assez de travail car il avait l’impression que je n’avais rien à foutre. Je me suis mis à pleurer dans mon cubicule. Après une trentaine de minutes de braillage, j’ai décidé d’aller directement chez mon médecin. C’est là qu’elle m’a fait comprendre que j’étais en dépression nerveuse. Je devais me rendre à l’évidence, les signes courraient depuis six mois.
Depuis la fin de l’été, j’avais des crises d’angoisses, des problèmes d’insomnies, une perte d’intérêt dans tout ce qui me tenait à cœur. Mon doc m’avait donné à deux reprises, pour dix jours, de l’Ativant pour m’aider à dormir mais ce n’était pas suffisant. J’ai donc pris de la marijuana au besoin dans mes périodes d’anxiété. Étant un consultant en informatique impliqué sur la gestion d’un projet qui n’en finissait plus, ces périodes étaient de plus en plus fréquentes.
Mon fameux lundi noir m’a donc amener en arrêt de travail avec une ordonnance de Paxil et d’Ativant en poche et la mission de me trouver un psy pour « régler mes problèmes ». Difficile de se l’avouer et de l’assumer, d’accepter sa « faiblesse » et son « échec ». Un peu comme accepter d’être homosexuel quand on est adolescent, j’avais l’impression de faire un « comming-out ». Je devais assumer ce que j’étais devenu et le faire accepter à mon entourage.
La recherche du psy était un fardeau, une honte. De choisir au hasard un étranger à qui on allait raconter tout ce que l’on est était pour moi une source d’angoisse. Après avoir repoussé plusieurs jours cette recherche, j’ai commencé à appeler, via les numéros de téléphone que l’association des psy du Québec m’avait donné, l’outsider qui allait traiter mes émotions. Quel ne fut pas ma colère quand, un après l’autre, on me refusa un rendez-vous sous prétexte de débordement de travail. Notre société en était-elle rendue là ?
Parallèlement, j’avais commencé à prendre mon Paxil à 10 mg par jour, pris conjointement avec de l’Ativant pour « m’aider » à dormir. Après trois jour, je fit un « bad trip » pire que tout ce que j’avais connu jusqu’à ce jour. Frissons, spasme, sueurs froides, panique, idées noires comme doit l’être la chaire pourrie d’un cadavre en décomposition… J’arrêta des le lendemain la prise de ce médicament. Coïncidence ou divine providence ? J’avais eu une prise de sang la veille. Le surlendemain, visite chez ma MD ; je lui explique le mauvais voyage que j’ai fait avec le Paxil. L’effet d’enfermement psychologique que cela me donnait, que je me sentais zombifié. Avec l’analyse sanguine, elle s’alarma en constatant que mes plaquettes sanguines étaient tombées à 82, la moyenne étant de 150. Arrêt pendant une semaine de médicaments, à l’exception de l’Ativan pour « m’aider » à patienter, le temps de voir si les plaquettes remontait. Et, comme le soleil se lève le matin, les plaquettes on retrouver un niveau satisfaisant pour commencer le Celexa la semaine suivant.
Entre temps, j’avais trouvé ma psy, une femme d’une trentaine d’année qui travail sur St-Josephe sur le Plateau. Une espèce de machine qui ne réagi qu’en rougissant des joues. Parlé de moi n’étais pas très difficile. Comme vous pouvez le constaté en me lisant, je ne suis pas vraiment secret avec ma personne. Les consultations ont été fixées à deux sessions par semaines. À soixante-dix piastres la session, ça faisait un peu cher. Mais pour me reprendre en main, j’étais prêt à tout. J’ai aussi acheté un petit livre intitulé « Le Burnout, Questions et réponses » écrit par Jacques Lafleur. Je le conseil à tout « débutant » ou « candidat » à la dépression. C’est un excellant ouvrage qui apporte beaucoup de réponses aux angoisses du début, quand on se sent seul à vivre ce calvaire.
Aujourd’hui j’écris cette petite chronique de ma vie pour expliquer le changement d’orientation que je veux donnée à mon traitement. Le Celexa pris à 20mg me cause quelques soucis.
Premièrement, contrairement à l’effet de perte de libido supposé, j’ai un appétit sexuel incroyable que même adolescent en puberté je n’ai pas eu. Je pourrai baisser comme un lapin, plusieurs fois par jour. Ce n’est ni logique, ni normal ; très contraignant pour moi qui doit contrôler cette envi (ce n’est pas un besoin !) et pénible pour la personne qui partage ma vie et qui subit beaucoup de pressions qui s’avoisinent presque à du harcèlement sexuelle (à 28 ans, je ressemble à un vieux mon’oncle vicieux qui pince les cuisses de ses petites nièces !)
Le deuxième effet du Celexa sur moi c’est une attitude d’automate pensant mais sans émotions. Quand je dis sans émotions faut le prendre au pied de la lettre. Je ne ressens pratiquement plus rien à l’intérieure de moi ; je pense les émotions. Je sais que j’aime. Je sais que tel chose me fait plaisir. Que certaines attitudes me font de la peine. Mais je ne fais que le savoir, je ne les ressens plus avec mon être… Je les ressens avec ma tête.
Cette désincarnation de ce que je suis m’a fait réagir. J’en ai évidemment parlé à ma psy. Elle pense aussi que la médicamentation en ai la cause et ma conseillé d’en parlé à mon MD. J’ai hier pris l’initiative de couper l’Ativant. Je me suis endormi sans problème. Nuit de sommeil de six heures. Un peu courte (j’en ai besoin de sept et demi) mais juste assez pour être fonctionnel aujourd’hui. J’ai aussi diminué le Celexa à 10 mg au lieu de 20. Ca ne sert à rien de travailler sur mon moi intérieur si je ne suis pas connecté à mon champ émotionnel.
Je vais poursuivre ce dosage pendant deux semaine en aviserait par la suite. Je compte réutiliser de la marijuana aux besoins pour me calmer la nuit si je fais une crise d’angoisse. Je suis partisan de l’utilisation de cette plante comme outils. Je n’aime pas l’effet festif que cela procure quand j’en prends en plein milieu de la nuit mais l’effet est tellement rapide et bénéfique… Les effets secondaires étant quasiment nul, le seul problème apparent à son utilisation pour moi tien plus de l’éthique (et de l’appétit que cela développe ! gare au sac à biscuit !) que du pratique.
Comme plusieurs le disent, les traitements et dosages sont différents pour chaque individu. La réaction que j’ai eu avec le Paxil, le Celexa et l’Ativant n’est pas la même que pour tout le monde. Vous serez peut-être choqué de mon utilisation de la marijuana. Mais dites-vous bien une chose. J’ai le goût de vivre. J’ai le goût de me redéfinir sans être obligé de tout rasé dans ma vie. J’ai encore mon instinct de survie et suit assez intelligent pour redécouvrir et voir mes limites. Notre société de performance nous anesthésies et nous faits oublier qu’avant toutes choses, nous sommes des êtres humains.
Montréal, 23 mai 2002
⋯@⋯.com