Je vais commencer par me présenter :
Je suis un homme de 32 ans, marié et papa de 2 enfants (Louise et Matthieu).
Il y a un peu plus de 10 mois, ma fille Louise est décédée. Elle avait 2 ans et 9 mois. Tout s'est passé très vite.
Jeudi 22 septembre, ma femme emmène Louise chez la pédiatre pour un simple rhume (du moins en apparence). Louise tousse un peu, elle a une légère fièvre... pas d'inquiétude... :roll: La pédiatre conseille alors de passer une radio des poumons juste pour infirmer un doute. Direction l'hôpital afin de passer cette radio, bilan de l'eau dans les poumons et 2 causes possibles : le coeur ou le foie.
Comme le résultat n'était tombé que le soir, il n'y avait plus personne sur place pour vérifier côté foie. Et comme Necker est spécialisé dans les problèmes de coeur des enfants et qu'il y a une garde toute la nuit, Louise a été transférée là-bas.
Echographie cardiaque et 2 minutes plus tard, le verdict tombe comme un couperet : elle a un gros problème au coeur (cardiomyopathie restrictive sévère). Elle reste hospitalisée. Chaque jour, l'équipe soignante (formidable au passage !) nous informe de nouvelles de moins en moins bonne... Du premier jour, où le choc fut que seule une transplantation pouvait la sauver, mais il y a peut-être un espoir de la stabiliser pour quelques temps (mois ? années ?) ; le deuxième et troisième jour où l'espoir de stabilisation s'était envolé (seule stabilisation possible jusqu'à une transplantation) ; du mardi (la veille de sa mort), où on a appris qu'elle ne tiendrait probablement pas jusqu'à sa transplantation, qu'elle était sur liste prioritaire des receveurs et qu'il fallait envisager une CEC (circulation extra-corporelle, mise dans un coma artificiel).
Du mercredi matin suivant (28 septembre), ma fille, mon bout de chou de même pas 3 ans s'arrête de vivre.
Plusieurs choses importantes :
- Entre ma femme et moi, on ne l'a jamais laissée une seconde (même la nuit) durant tout le séjour à l'hôpital
- Dans le pire, on a eu le meilleur : Louise a commencé à souffrir au moment où nous sommes allés à l'hôpital, cela n'a duré que 6 jours
- Avant, on ne connaissait pas sa maladie, elle a pu vivre normalement et profiter pleinement de chaque jour
- Louise a un petit frère qui va bien et qui nous a aidé à remonter la pente
- On a vécu intensément chaque jour des 2 ans et 9 mois de Louise (on était et on reste très proches de nos enfants)
Maintenant, si j'écris ces lignes avec le recul, c'est pour laisser une trace, un témoignage comme quoi, on peut s'en sortir.
En effet, le moment de l'hospitalisation fut particulièrement dur (l'annonce terrible, essayer de travailler en même temps, essayer de voir Matthieu qui avait 6 mois à l'époque et qui ne comprenait pas ce qu'il se passait). La mort de Louise a été un gros choc et évidemment la dépression était imminente... Les premiers mois sans elle étaient terribles (on entendait sa voix résonner à chaque instant, on sentait son parfum, sa présence, ...). Bref, on a très vite pris le parti de se faire aider psychologiquement. Une psychologue nous a beaucoup apporté (déculpabilisation, soutien, faire entrevoir l'avenir). Le temps a également apporté sa pierre à l'édifice. Enfin, le travail a aussi contribué à notre rétablissement.
Depuis, on pense toujours à Louise. Elle est et restera à jamais ma fille, la grande soeur de Matthieu. Elle n'est plus là, mais je sais qu'on l'a rendu heureuse même dans les moments les plus terribles. On l'aime (je l'aime et cette phrase est bien au présent).
Quand je pense à ma fille, c'est tendrement, c'est pour me souvenir de tous les moments que j'ai pu partager avec elle. Maintenant, ma préoccupation, c'est d'être complice avec mon fils (que j'avais négligé lors de la mort de ma fille), j'y suis arrivé.
A tous ceux qui ont souffert et qui souffrent encore, on peut s'en sortir. C'est dur d'imaginer la vie sans la personne aimée, mais l'entourage permet d'y arriver. Réhabituez-vous au bonheur, c'est comme ça qu'on peut survivre et même retrouver la joie.
Merci à tous, car les moments où je n'allais pas bien, j'ai pu trouver des questions et réponses ici et ailleurs. Et c'est uniquement maintenant que je vais mieux, que je trouve les mots pour oser en parler. Auparavant, l'émotion était bien trop forte... Alors il est temps pour moi d'apporter ma petite pierre à tous ceux qui en auront besoin.
Jef