À peine 15 % des élèves des écoles publiques régulières vont à l’université, selon une étude de l'Université de Montréal publiée dans la revue Social Inclusion. Un élève sur deux du public régulier arrête ses études après le secondaire.
« En moyenne, 70 % des élèves québécois qui terminent leurs études secondaires accèdent aux études collégiales et, parmi eux, la moitié (35 %) se rend à l’université
», indique le communiqué.
« Toutefois, le taux d’accès aux études supérieures varie grandement selon le type d’école secondaire fréquentée, ainsi que le niveau de scolarité et le revenu des parents.
»
Pierre Canisius Kamanzy, professeur à la Faculté des sciences de l'éducation de l'Université de Montréal, a analysé les données d'une étude menée avec une cohorte de 2677 élèves québécois nés en 1984 et ayant pris part à étude de Statistique Canada amorcée en 2000. L'étude a suivi le parcours de près de 30 000 enfants sur une période de 10 ans.
À l’âge de 22 ans, un élève sur deux (49 %) inscrit dans le programme public ordinaire au secondaire a atteint le cégep, en comparaison de 91 % chez ceux inscrits dans un programme public particulier (mathématiques, sciences, langues, sports par exemple) et de 94 % chez les jeunes qui ont été dans une école secondaire privée.
L’écart est encore plus marqué en ce qui concerne les études universitaires : 15 % des jeunes du programme ordinaire y accèdent, contre 51 % chez les élèves des programmes particuliers et 60 % chez ceux du privé.
«
Pour constater la surreprésentation des élèves du privé à l’université, notons qu’ils sont 60 % à y poursuivre leurs études, tandis que seulement 16 % de la cohorte fréquentait le privé, illustre-t-il. Par comparaison, 51 % étaient dans le programme ordinaire au secondaire et seulement 15 % se sont rendus à l’université…»
« Le parcours scolaire et les revenus des parents ont aussi un effet direct sur le prolongement des études des enfants.
»
«
Ainsi, la moitié (54 %) des élèves du secondaire dont les parents ont au moins un diplôme d’études secondaires (DES) poursuivent des études collégiales. Cette proportion grimpe à 89 % lorsqu’un des parents possède un diplôme universitaire.L’écart se creuse davantage lorsqu’on s’arrête aux études universitaires : seulement 20 % des jeunes les entreprennent quand leurs parents ont un DES, comparativement à 32 % chez les élèves dont les parents sont titulaires d’un diplôme d'études collégiales et à 60 % chez ceux dont au moins l’un des parents a un diplôme universitaire.
“Pour cette variable, on constate que le taux de jeunes qui se rendent à l’université est trois fois supérieur parmi ceux dont les parents ont fait des études universitaires, par comparaison avec ceux dont les parents ont un DES, observe Pierre Canisius Kamanzi. Cet important écart est toutefois moindre lorsqu’on se penche sur les revenus des parents.”
En effet, les élèves dont les parents ont un revenu annuel modeste (situé dans le premier quartile) sont 59 % à fréquenter le cégep et 23 % à aller à l’université. Par contre, parmi ceux dont les parents ont un revenu situé dans la catégorie supérieure (quatrième quartile), 78 % accèdent aux études collégiales et 46 % vont à l’université. »
« Selon le professeur Kamanzi, l’enseignement secondaire québécois a progressivement évolué vers un système plus élitiste à partir du milieu des années 90.
»
«
“Devant la compétition des écoles privées qui, pour la grande majorité, sélectionnent les élèves ayant les meilleures notes, le réseau secondaire public a voulu lui aussi retenir les plus talentueux en créant des programmes particuliers comme en sciences, en mathématiques, en arts, en sports ou en musique”, mentionne-t-il.Selon lui, la création de ces programmes a eu l’effet pervers de “ghettoïser” davantage les jeunes des classes ordinaires, composées d’une majorité d’élèves faibles ou en difficulté.
“Nos données montrent que l’école secondaire fréquentée a une influence directe sur la suite du parcours scolaire des élèves, affirme-t-il. Or, le marché québécois de l’école secondaire perpétue les inégalités sociales au lieu de contribuer à les aplanir en offrant un enseignement de qualité identique à tous, quelle que soit leur origine sociale.”
“La vision égalitariste de l’éducation véhiculée par les politiques publiques au Québec – et promue depuis le dépôt du rapport Parent dans les années 60 – a été en partie compromise au cours des dernières décennies par l’expansion d’un marché de l’école secondaire caractérisé par une certaine forme de ségrégation sociale”, conclut M. Kamanzi. »
Pour plus d'informations, voyez les liens plus bas.
Psychomédia avec sources : Université de Montréal, Social Inclusion.
Tous droits réservés