Ce qui va relier la mère à son enfant tout de suite après la rupture de cordon ombilical, c’est la voix. Cette voix va le nommer et lui permettre de prendre corps et de se relier à sa mère. Par la fermeture du corps, la voix créera une ouverture symbolique qui reliera l’enfant à sa mère. Elle lui permettra de prendre sa place dans le monde. Par
La voix de mère en vocalisant avec lui crée un échange inconscient qui construira son affect. Elle dynamise son bébé en produisant des sons plus aigus et lui, l’imitant fait de même. C’est la voix de sa mère qu’il reconnaît en premier avant que de la voir.
Denis VASSE a fait l’expérience analytique de l’ombilic ouvert chez l’enfant psychotique.
L’image de son corps se répand, désarticulé son corps ne fait pas un, il ne le reconnaît pas il ne le concerne pas. La voix étant le cordon ombilical auditif permet de recréer un lien avec la mère.
(Denis Vasse « l’ombilic et la voix »).
Depuis le ventre de sa mère, l’enfant a enregistré tous les bruits organiques du corps de sa mère et le sien, puis par la suite tous les bruits, paroles, mouvements qui ont générés des émotions et construits son affect.
Le bébé va émettre des sons comme des vocalisations expressives,
traduisant son émotion et permettant un échange avec la mère qui l’imitera à son tour. Les mimiques et rituels pseudo symboliques seront la matrice permettant l’évolution affective de l’enfant. La voix de la mère témoigne de sa présence. Ainsi la mère saura moduler sa voix en fonction des besoins de son enfant. On a pu démontrer que la température cutanée du sein maternel augmentait en fonction du cri de l’enfant. La mère crée un espace d’accordage selon D. Stern premier objet de la communication. Ce qui est important au travers de la voix de l’un comme de l’autre c’est l’état émotionnel qu’elle témoigne, tendresse, impatience, agressivité, joie etc. Un bébé au son d’une voix s’apaisera ou avec une autre le contraire. Tout au long de son parcours, la voix entrera dans le psychisme de l’enfant comme l’expression d’un affect inconscient. La voix en tant que témoin manifeste de la charge affective, donne la mesure de l’investissement psychique primaire. Sans la mère, l’enfant serait inapte à repérer les sons et les restituer, lui donnant son statut de sujet humain et lui permettant non seulement de s’entendre, mais d’entendre l’autre comme référent à soi-même, tel un écho provenant de l’inconscient prenant son sens dans le conscient. Ainsi, par sa voix, la mère engendre la musique et la musique deviendra le signifiant de la mère en tant que médiation corps et affect.
« Une sonorité de la voix maternelle à distance est promesse d’une rencontre qu’il attend, avec une tension vers son jouir qui lui fait développer la reconnaissance auditive de cette voix. Par delà la distance du corps à corps entre le bébé et sa mère-nourrice, lorsque celle-ci est sortie de son champs visuel, ce sont les perceptions subtiles de son odeur et de sa voix qui continuent à être pour l’enfant le lieu dans l’espace qui l’entoure, où il guette le retour de sa mère, c’est à dire le lieu de son lien narcisant à elle et la continuation de ce ressenti vivant en sécurité qu’il éprouve avec elle. » (F.DOLTO l’image inconsciente du corps P 69)
Avant d’avoir un sens, la voix est synonyme de présence. Lorsque bébé fera l’expérience du manque, les vocalises, l’aideront à supporter l’absence, paroles abstraites qui le mèneront plus tard au langage. Pour Proust la voix maternelle joue le rôle de « miroir sonore » calmant dans le sombre de la nuit, par son intonation mélodieuse et tendre, l’angoisse de l’enfant qui craint de perdre son objet d’amour. Dès la deuxième semaine la voix de la mère arrête les cris du bébé beaucoup mieux que n’importe quel autre son ou que la présence visuelle du visage humain (Mehler « la reconnaissance de la voix maternelle par le nourrisson « p 70.) Cela prouve que la voix de la mère a été identifiée par l’enfant et possède une valeur positive. Les intonations de la mère sont indispensables à son identification. Ainsi une voix monocorde sans stimuli, ne représentera pas la mère.
Expérence de Louise Robb
La musicalité émotionnelle dans l'affect vocal entre mère et nourrisson,
et étude acoustique de la dépression postnatale
Pour être source de plaisir pour les deux partenaires, la communication entre mère et nourrisson doit présenter des éléments "musicaux". Lorsque la mère souffre de dépression postnatale, la qualité de la concordance rythmique, de la réciprocité et de la satisfaction globale retirée de l'interaction faiblit, et ce tant chez elle que chez son bébé. On présente ici une étude de cas fondée sur une analyse acoustique fouillée et réalisée en deux temps (lorsque le nourrisson est âgé de huit semaines et de six mois) des interactions vocales entre une mère dépressive et son bébé. Elle est ensuite comparée à une analyse identique conduite sur une dyade bien portante aux mêmes périodes du développement de l'enfant. La mère dépressive propose à son bébé de huit semaines des vocalisations plus ternes, plus graves et ponctuées de longues pauses. La perturbation est également manifeste dans son comportement. L'harmonisation sur des hauteurs plus graves, la stimulation plus faible, la "participation" moindre et les états d'humeur négatifs relevés chez le nourrisson de la mère dépressive témoignent, semble-t-il, d'un niveau affectif pauvre. La qualité de la communication entre les partenaires de la dyade dépressive est supérieure quatre mois plus tard, lorsque les symptomes cliniques de la mère se sont estompés. Si les deux dyades attestent une périodicité rythmique dans l'interaction, celle-ci est considérablement plus lâche et nettement moins coordonnée dans la paire dépressive. La dyade témoin montre davantage de réciprocité et de plaisir dans la communication, ce que traduisent la régularité du rythme et la qualité "chantante" de la voix. Ces résultats établissent l'importance des caractéristiques objectives qui définissent la musicalité de communication dans les interactions réciproques de partenaires en bonne santé. Ils éclairent de même le rôle qu'un sens inné de la pulsation et du partage de l'espace temporel à l'intérieur d'une structure musicale joue dans l'organisation des motifs qui règlent le comportement du bébé.
Dès la deuxième semaine la voix de la mère arrête les cris du bébé beaucoup mieux que n’importe quel autre son ou que la présence visuelle du visage humain (Mehler « la reconnaissance de la voix maternelle par le nourrisson « p 70.) Cela prouve que la voix de la mère à été identifiée par l’enfant et possède une valeur positive. Les intonations de la mère sont indispensables à son identification. Ainsi une voix monocorde sans stimuli, ne représentera pas la mère.
Vers la huitième semaine, Wolff remarque « une quantité signifi- cativement plus élevée de vocalisation quand le partenaire parle que lorsqu’il est silencieux »(Ibid) Selon Bower (le développement psychologique de la première enfance ) l’enfant possède un mode de communication qui lui est propre. Il cesse de pleurer quant on lui parle. Il s’essaie à de petits sons gutturaux « lé-lé » ou « lala » ou a-a (lallations.) Comme Il distingue certains phonèmes voisin de « p » et b » ».
A partir de 2 mois bébé babil :
Il s’immobilise ou tourne la tête quand on lui parle. Il émet des vocalises différenciées « ah » « eh » « oh » isolées et occasionnelles, souvent gutturales, de petits cris brefs et clairs et des couinements de plaisir. . Parmi les consonnes difficiles à transcrire phonétiquement « p », b »(, t/d » rr (campos 1988) bien que dans leur aspect primitif ces chants assureront les bases du langage communicatif.
A 3 mois les gazouillis et sourire :
D’après Pichon c’est le stade du gazouillis. La vue du visage humain provoque un sourire (Spitz 1968). Il ne se contente plus de crier, Il fait appel à vous pour dire son besoin (Bühler 1934, lacan 1975a). Il se met à jouer seul avec des vocalisations prolongées telles que « are-are », « ague » ou « agre-agre ». Les gazouillis seraient l’équivalence du « fort-da » décrit par Freud, jeu vocal qu’il retrouve pour maîtriser la douleur de l’absence de la mère.
Entre trois et six mois :
Bébé commence à répondre activement à la musique au lieu de la recevoir passivement. Il se tourne vers le violon ou le tam-tam par exemple. Son plaisir est évident ! il s’étonne ! Il invente la danse exécutant des mouvements d’accompagnement assez bien rythmés. Il se montre même capable de distinguer deux mélodies (chromatiquement différentes.) En revanche, si la mélodie est transposée, il ne fera pas la différence.
Puis tourne la tête pour regarder quand on l’appelle. Il reprend à la suite de sa mère, dans son ton, rit aux éclats, répond par des modulations variées aux paroles qu’on lui adresse.
A 5 mois première chanson :
Il pousse des cris de joie (aigus), rit en manipulant ses jouets. Cette vocalisation semble de type pré musical plutôt que pré langagier : sons de hauteurs variées modulant une voyelle ou très peu de syllabes (« ba » « gue » « ké ») Cet exercice ludique du chant spontané vas se poursuivre, se perfectionner et se socialiser tout au long de la première année.
A 6 mois
On parle d’un déchaînement psychomoteur.» Il s’assoit, se retourne, rampe, saisit les objets… Il crée certaines sonorités avec des instruments de musique improvisés : par exemple il tape sur la table ou frotte avec une cuillère. Il se gargarise avec sa voix (pré verbiage) faisant des roulades (modulations variées avec des changements de ton : comme « rrr » ou « gurgur » qu’il reproduit en série. Il exerce les labiales « ppp » « bbb » avec projection de salive. Il peut limiter la hauteur, la faire varier, détecter les changements du contour mélodique.
A 7 mois :
Apparition des dentales avec les voyelles (« ba, « « da » « ta » « pa ») ainsi que diphtongue (sia, lia boi) Apparaissent le son (« y, s, et v »)
A 8 mois :
Il tente de se séparer de la mère en rampant sans perdre son contact par le regard ou la voix. Jeu du fort da décrit par Freud tâchant sur le plan émotionnel de maîtriser le degré de proximité de l’objet maternel.
Il participe à « coucou me voilà » avec des excitations joyeuses. Il fait l’expérience de la présence et de l’absence (Lacan 1953-1975 p 53)
Il commence à fabriquer des sons en frappant sur des objets ou l’un contre l’autre et en tire de la fierté. Les formants s’organisent.
A 9 mois : il montre sa capacité d’imiter des modèles sonores nouveaux et imite des phonèmes nouveaux (écholalie).
Entre 12 et 18 mois :
Phase de castration anale. C’est le moment du mot-phrase, langage social d’affirmation de soi, Il veut exprimer sa présence.B. Auriol la clef des sons p 13 à 24
Selon M.F Castarède bébé boit les paroles de sa mère comme du lait d’où l’importance de cette période pré-langagière au niveau du développement psycho-affectif de l’enfant.
« Les émissions vocales sont pour le bébé l’occasion de se donner des sensations agréables, cénesthésiques ou kinesthésiques, au niveau du diaphragme, des poumons, du larynx, du pharynx, du palais, de la langue, des dents, des lèvres, par l’expulsion ou la rétention de la colonne d’air. Elles constituent enfin la possibilité pour lui d’exercer ses perceptions auditives et de développer cette synergie fine entre les mouvements phonatoires et leur image sonore.(M.F Castarède « la voix et ses sortilèges »p 80)
Ainsi l’activité vocale est source de plaisir, entre la mère et l’enfant, et lorsque tous deux vocalisent à l’unisson : c’est ici la préfiguration du « chœur » (D.Stern Mère-enfant : « les premières relations » p 30 )