Réponse à: CIBOULETTE (joueuse excessive à 60 ans)
Surnom: CIBOULETTE
Pays: Canada
Âge: 60
Sexe: féminin
Depuis les 2 dernières années j'ai découvert les vidéo poker au début je jouais prudemment mais j'aimais véritablement cela. Depuis mon problème s'est aggravé, je joue environ une fois semaine mais quand je joue je n'ai pas le contrôle je pars avec un montant mais c'est jamais suffisant je retire toujours de l'argent voir même sur ma carte de crédit. Inutile de vous dire que mon conjoint n'en sait rien toujours une menterie de préparée à savoir soit que j'ai gagné quand ce n'est pas vrai ou tout simplement que je n'y suis pas aller quand c'est le contraire. Je me rends compte que c'est devenu une vraie maladie et que je suis en train de me ruiner et de m'endetter et je n'ai pas ces moyens là. Je pars toujours avec de bonnes intentions mais quand je suis sur la machine j'oublie tout je suis obsédée par cet appareil plus rien ne compte jusqu'à ce que j' aie tout dépensé. Consciente du problème je me parle toute seule mais ca ne règle rien. Je sais qu'il existe des groupes mais ici dans ma ville trop de monde se connaisse et se reconnaisse et j'ai quand même mon orgueil je voudrais arrêter par moi-même mais commentaire tout avouer et demander l'aide à mon conjoint s'il accepterait de gérer le budget je ne pourrais lui mentir mais il ne veut pas il me fait entièrement confiance. Je suis de plus en plus réaliste et je sens que si je ne fais rien je vais sombrer dans la déchéance et à mon âge ce serait épouvantable . Est-ce possible de développer de telles habitudes à 60ans. Avant je ne m'intéressais pas à tout ces gadgets quine font que nous leurrer. L'appât du gain !!!!! Merci de votre aide et c'est formidable de vous lire c'est une aide qui ne coûte rien et qui nous rends la vie plus facile . Les difficultés des uns et les réponses données m'aide à vivre mon quotidien dans bien des domaines. Encore Merci
Bonjour Ciboulette.
D'emblée, je voudrais répondre à la question de savoir si on peut développer des habitudes de jeu compulsif ou excessif à 60 ans. La réponse est oui, Ciboulette. Il n'y a pas d'âge pour devenir joueur excessif et la tendance actuelle au Québec va en augmentant, peu importe l'âge. Chez les adultes, par exemple, le taux de joueurs excessifs dans la population était de 1,2% en 1989 et de 2,1% en 1996, ce qui représente environ une progression de 75%.
Je voudrais ici prendre un peu de temps pour vous faire remarquer quelques éléments de votre question sur lesquelles vous pourriez réfléchir.
Vous dites partir avec de bonnes intentions lorsque vous allez jouer. Lesquelles? Perdre 20,00$, ou 40,00$ SEULEMENT? Mais quel est donc l'intérêt de perdre ce montant? L'attrait de gagner davantage? En fait, vous SAVEZ en partant de chez-vous que vous allez perdre ce montant et vous ESPÉREZ que ça n'arrivera pas. En fait, vous vous vendez l'idée que la magie opérera. Et ça n'arrive jamais. Parce que seuls les joueurs occasionnels peuvent PARFOIS faire un gain. Parce que le joueur excessif remet en jeu les petits montants gagnés pour se faire plus : il ne peut pas faire autrement. Parce que le joueur excessif ne sait pas arrêter.
Lorsque vous partez de chez vous, il est possible que vous vous soyiez vendu l'idée que vous vous contrôlerez. Mais il y a un problème. Le jeu est comme un slinky vous savez ce petit ressort qui amuse les enfants? ça ne remonte jamais. Le seul moyen de l'arrêter de descendre est de cesser de jouer avec. Souvent les joueurs excessifs entretiennent l'idée qu'ils pourront se contrôler. C'est une illusion destinée à vous garder devant la machine. Vous savez en vous-mêmes que vous avez perdu ce contrôle. D'ailleurs, vous le dites vous-mêmes.
Vous dites aussi que vous savez qu'il existe des groupes mais que chez-vous, les gens se connaissent trop et que vous avez votre orgueil. Là, Ciboulette, je dois vous arrêter. Vous vous sentez honteuse de ce que vous faites et vous ne voulez pas l'avouer à votre conjoint ni prendre la chance d'être vue dans un groupe de joueurs. Cela fait partie de votre orgueil, comme vous dites. Mais dites-moi : où est votre orgueil lorsque vous sortez d'un bar avec une dette que vous n'avez pas les moyens de rembourser? Où est votre orgueil lorsque vous sentez que ça recommence comme la dernière fois et que vous réalisez qu'une fois de plus, vous n'aurez pas le contrôle? Et où sera votre orgueil lorsque vous aurez épuisé vos ressources et que, prise au piège, vous aurez à dire à votre conjoint que non seulement vous avez un problème de jeu et que vous ne lui en avez pas parlé, mais que la dette est devenue tellement grosse qu'il faut peut-être vendre la maison ou l'auto pour arriver à la payer? Cela peut vous sembler exagéré mais il faut savoir que chez les joueurs excessifs, 50% on manqué 5 journées de travail au cours du dernier mois, 37% on volé de l'argent, 68% ont commis des actes illégaux et que 30% ont plus de 75000$ de dettes. Le principe est bien simple. La situation ne peut pas s'améliorer. C'est comme le slinky. Ça va toujours aller en empirant.
L'orgueil dont vous parlez ne peut que vous apporter des ennuis. À la limite, pour ne pas avoir à en parler, vous risquez même de devenir suicidaire.
Il vous faut donc cesser de jouer au plus vite, et pour cela, il vous faut de l'aide. Très peu de gens en effet réussissent à se libérer du jeu excessif par eux-mêmes. Environ 6% comparativement à 85% avec un traitement adéquat.
Pour cela, il vous faut d'abord accepter que vous avez perdu le contrôle. L'accepter pour vrai. Cela veut dire cesser de penser que vous pourrez vous refaire et accepter que vous ne retrouverez jamais plus l'argent que vous avez perdu. Il vous faut faire le deuil de cet argent, Ciboulette, et vous centrer sur l'argent que vous n'avez pas encore dépensé et que vous pouvez éviter de dépenser si vous réagissez. Bref, il vous faut «lâcher prise». Cela veut aussi dire travailler sur ce que vous appelez votre orgueil! Songez-y. C'est peut-être humiliant de dire à d'autres personnes que vous n'avez pas le contrôle sur le jeu. Par contre, il faut être très fort pour faire cela!!! Ça dépend sous quel angle on voit la situation.
Et pour cesser de jouer, vous avez deux options : les groupes de soutien ou le traitement psychologique.
Les groupes de soutien comme «Gambler Anonymes» ont l'avantage de ne rien coûter. Tout ce que cela demande est une grande motivation et la participation aux réunions généralement hebdomadaires. Il faut cependant être ouverts à la dimension religieuse de ce type de mouvements qui font appel à un «puissance supérieure». Certaines personnes croient à cela alors que d'autres sont agressés par une telle référence. À vous de voir.
Les traitements psychologiques sont dispensés par des psychologues spécialement formés pour cela. Il y a généralement des frais pour suivre ce traitement. Afin de trouver une référence dans votre région, vous avez la possibilité d'appeler le «Centre québécois d'excellence pour la prévention et le traitement du jeu», qui dépend de l'Université Laval. Les gens de ce centre pourront vous référer à la ressource la plus près de votre région. Pour cela, vous pouvez appeler à Montréal (514-524-1333) ou à Québec (418-656-5389).
En terminant, Ciboulette, je vous souhaite bonne chance
Mais pas une chance due au hasard
La chance que vous vous donnerez vous-mêmes de sortir de ce cauchemar.
Jean Rochette, Psychologue