Je ne dirai pas que j'ai vécu les mêmes situations, mais le sentiment de rejet, de solitude, d'incompréhension, d'être différente, de pas fitter dans mon milieu, ça je l'ai vécu. J'peux te conter un tit peu mon histoire, mais j'veux aussi te donner des pîstes de ce qui m'aide au quotidien, les choses que j'ai réalisé avec le recul. Prend ça comme le célèbre "tout vient à point à qui sait attendre", prend ça comme de l'espoir, une tape dans le dos, un clin d'oeil bienveillant.
Bon, je viens d'une famille de 4 enfants où je suis la dernière venue, avec un bon écart par rapport aux autres. Mes parents, gentils et aimants, ne se sont pas rendus compte qu'ils ne me rendaient pas service en étant très casaniers et pas très portés à recevoir des amis ni même me mettre en contact avec des gens de mon âge pour que j'apprenne les bases de la sociabilisation. Étant de nature solitaire, réservée, timide, et à la limite anxieuse, je ne comprenais pas trop comment interagir avec les autres une fois parvenue à la maternelle. Si on ne venait pas vers moi, je n'allais vers personne. D'ailleurs, j'avais apris à jouer très bien toute seule, et je trouvais le monde de mon âge compliqué à comprendre, moi qui interagissait avec des adultes à la maison. Ma relation de confiance était plus facile à nouer avec l'enseignant qu'avec les autres jeunes. Je me suis fait des amis grâce à des travaux d'équipe, mais certaines amitiés se sont révélées être des pièges. Je me sentais seule et coupable alors j'étais facile à manipuler, on pouvait être méchant avec moi et je souffrais en silence, je laissais mes bourreaux continuer leur manège, parce qu'il y avait bien un bénéfice à tout ça, je n'étais pas complètement seule, je voulais être aimé par des gens de mon âge. Je ne voyais pas que j'avais le droit de dire non, d'être en colère et même de changer d'amis, d'aller vers les autres. Tout cela me semblait impossible à réaliser, alors je me retrouvais souvent avec des gens pas faciles à vivre, qui ne s'aimaient pas et me demandaient beaucoup d'énergie. Au primaire c'était moins pire, pcq au moins j'étais entourée, mais au secondaire, ça a pris un bon 3 ans avant que j'aie des amis véritables. Je suis une hyper sensible, et le monde n'est pas dans sa période la plus délicate à ce moment là, ils testent les gens, veulent faire réagir, tentent d'exclure, de suivre des modes, de se montrer faussement matures, les concours de popularité, faire des mauvais coups, etc. Et j'étais une planche à repasser avec des tites filles qui commençaient à avoir des seins, à attirer les regards. Et pourtant je me pensais plus matures qu,elles d'un point de vue psychologique, mais mon corps ne suivait pas. Je n'arrivais pas à faire ma place. J'avais l'impression que la majorité des gens ne m'aimaient pas, que j'étais inutile. Heureusement j'ai rencontré des filles aimables, hypersensibles elles aussi, limite dépressives, mais qui s'en sont bien sorties avec le temps. On pouvait se confier entre nous, on partageait un humour semblable, une façon de voir le monde semblable. On n'avait pas nécessairement les mêmes goûts, mais au niveau de notre façon de voir les choses, c'était assez similaire pour qu'on se soutienne. À moment donné on a eu à faire un exercice dans un cours d'arts dramatiques. On devait mettre notre nom à piger, et s'il sortait, chacun devait dire ce qu'il pensait de cette personne. Et là j'ai eu le choc de ma vie. Les gens que je trouvais les plus baveux, qui me faisaient le plus peur, que je n'arrivais pas à comprendre, ils ont dit de moi "tu as l'air smatte, mais on ne te connais pas beaucoup, ça serait l'fun que tu parles plus". Et des gens plus normaux, mais pas plus mes amis, c'était "tu es gentille, quand on a parlé de telle chose ensemble tu placottais beaucoup, mais ensuite on ne s'est pas reparlés, mais tu as l'air d'être bien toute seule". Et après ça, ça m'a enlevé un tel poids! je me suis dit "comment ça se fait que je ne voyais pas ça, que je n'aie pas réussi à passer par dessus les malentendus, les plaisanteries, l'image de tof qui dans l'fond est un gars gêné qui fait le clown devant ses amis". Et dire que j'ai envoyé tout ce temps le message "ne m'approche pas" alors que j'espérais e contraire.
Mais pas de chance, je m'en vais au cégep et ce n'est plus le même monde...je repars, mais pas exactement de zéro, pcq j'ai au moins compris que je ne dois pas me fier aux apparences, que je dois insister pour aller vers les gens qui m'intéressent, que je dois faire ma place pcq sinon personne ne me la donnera spontanément, même qu'ils n'attendent que mon moove pour en faire un de leur bord. Je rencontre du monde smat, encore grâce aux travaux d'équipe imposé, et en sciences humaines, c'est genre, mettez-vous en équipe de 5...alors ça fait plus de monde à rencontrer, pis tu te sens pas la seule conne pognée en équipe de 3 quand tout le monde est à 2 comme au secondaire...là tu deviens la personne qu'on attend pour compléter l'équipe de 4, le chaînon manquant, tu ne t'imposes pas, on a besoin de toi! Et les autres aussi sont gênés, vulnérables, pcq tout est nouveau pour eux également. Pis à la limite, c'est pas grave si tu es beaucoup dans tes livres, tu passes pour studieux, indépendant, autonome. Bon, encore là j'avais tendance à dîner seule, faire des devoirs sur l'heure du midi, me tenir un peu en retrait. Mais au moins, le monde me disait bonjour, puis en me connaissant plus, me disait, reste pas tu-seule, viens manger avec nous, pis là je rencontrais encore d'autres personnes amusantes. Je ne dis pas que c'était des âmes soeurs, mais juste du monde positif qui me sortait de ma bulle, qui me montraient qu'il y avait du fun à se faire dans ce monde. Trop timide pour flirter en personne( et même m'imaginer qu'un gars puisse me remarquer), je rencontrai mon premier amour sur le web, sur ce site, même, à la section correspondance. Là je suis allée vers quelqu'un avec qui je partageais certaines passions plus profondément. Bon, ça n'a pas toujours été facile, mais encore là, au moins j'ai découvert que quelqu'un pouvait m'aimer en tant que femme, j'veux dire aimer mon corps aussi, pis celle que je suis réellement, pas juste le masque de la gentillesse, mais aussi dans mes défauts, dans mes inquiétudes, dans mes difficultés. 1 an plus tard grosse peine d'amour, je me demande si je pourrai un jour connaître quelque chose d'aussi fort, et vlan, un autre gars apparaît dans ma vie. Ça se concrétise très vite, je m'attache à ses amis qui sont rigolos et artistiques, qui deviennent les miens, à sa famille qui est très chaleureuse très "groundée". Il m'aide à me trouver un premier boulot, on emménage ensemble. Puis pow, un ami commun meurt, suicide, pendaison, et à quelques jours d'intervalle son grand-père qu'il aimait beaucoup. Il fait une dépression, je roche dans mes études et dans ma job, et dans mon humeur évidemment. Mais une attention de mon ami pendu me touche, il ne faisait pas confiance à beaucoup de gens, et pourtant il a laissé des lettres à 3 personnes dont moi. Ça me dit que même si je n'ai pas vu venir son acte de détresse, il a senti que j'étais là pour lui, que je le comprenais un peu, que je ne le jugeais pas. Au lieu de rester avec le sentiment de culpabilité, je reste avec l'impression d'avoir fait de mon mieux. En plus, il a pris la peine de me souhaiter du bonheur et un bel avenir, encore une marque d,attention fort appréciée. Comme s'il me disait "ce que j,ai fait m'appartiens, ce n'est pas une solution pour vous, vous allez très bien vous en sortir". Mon chum, pour sa part, tombe en dépression durant 6 mois, puis remet plein de choses en question et me laisse. Dur coup, je retourne chez mes parents tout en continuant mon travail que je trouve dur et l'école qui me passionne même si je ne performe pas comme il faudrait pour mon programme. En plein été, je me mets à voir plus souvent un gars qui me plaisait, mais qui est trop proche de l'ancien cercle d'amis de mon chum. Puis on se dit fuck, on s'aime, on essaie. Au début, grosse chicane, je me fais même traiter de salope, on part la rumeur comme quoi j'avais déjà une liaison avec ce gars et que j'ai jamais aimé l'autre (durant 2 ans et demi quand même!), bref, n'importe quoi, et tout pour blesser la sensible que je suis! Quelques jours après, la situation est clarifiée et réglée avec mon ex, on reste bons amis. Une amie ne me parle plus c'est pénible, ça me fait mal, ça dure quasi un an comme ça. Puis on se reparle et les choses se calment. L'orgueil est mis de côté, le bon sens revient, l'amitié renaît doucement, même si elle est fragilisée. Je suis toujours avec mon chum, ça va faire 3 ans, j'ai fini un bac, je n'arrive pas à trouver d'emploi dans mon domaine. Je me fait chier dans un travail qui m'épuise, paye mal, ne me valorise pas et me confronte chaque jour à ma phobie sociale (c'est dans le public et sous pression). Et soudain, encore une belle récompense pour ma patience, un monsieur m'offre un emploi, mieux rémunéré, avec un horaire stable, tout près d'où j'habite en prime. Ce n'est pas dans mon domaine et ça me demande encore de la souplesse, de l'adaptation, mais j'y suis arrivée. Ça va faire 3 mois que j'y suis, et j'aime ça! C'est beaucoup plus relax. Les gens sont souriants, ils savent mon nom, ils me demandent comment ça va. Autant l'équipe de travail que les clients, et ça c'est quelque chose par comparaison avec ce que j'ai connu pendant 4 ans. Et ce qui m'a touché, c'est que je n'ai pas eu d'entrevue à passer, mon boss est venu me recruter direct, en me disant qu'il me voyait travailler, aimait mon attitude (gentille, serviable, souriante, à mon affaire), et avait mieux à m'offrir si je le voulais bien. Ça fait tellement de bien de n'avoir rien à prouver, juste faire de son mieux et être reconnaissante de la confiance qu'on me témoigne. Je considère que je me suis fait 2 amis au travail jusqu'à maintenant, on ne se voit pas en dehors du travail, mais je pense que si je le voulais ce serait possible. On a des discussions profondes, on s'échange des anecdotes, des confidences, on se révèle un peu sur qui on est, ce qu'on aime.
Mes conseils maintenant...Toujours porter attention à la main qui se tend, tu ne sais jamais jusqu'où ça peut te mener. Accepter d'être confronté aux autres, prendre le risque d'être blessé, sinon on n'avance plus, on stagne, on vit d'ennui et de désespoir, on se complaint dans notre mal-être, on nourrit notre haine, on s'empêche d'avancer.
Faire des activités valorisantes pour travailler la confiance en soi, exemple pour toi: tu peux écrire des textes, composer des chansons, te joindre à un groupe qui font ça, partager ta passion.
Accepter que l'âme soeur, n'est pas unique...tu peux avoir une conversation profonde avec quelqu'un que tu ne reverras jamais, tu peux avoir plusieurs amis qui pensent tous différemment mais chaque point de vue va t'apporter quelque chose. Rester ouvert d'esprit, s'ouvrir aux autres, prendre le temps d'écouter les autres.
Ne pas juger. Si tu te sens jugé, au lieu de répliquer sèchement ou de te retirer, tu peux demander à l'autre de s'expliquer, lui dire que telle chose te blesse. Ce n'est pas en se liant à des gens qui pensent exactement et tout le temps comme nous qu'on grandit, il faut savoir reconnaître que chacun a une expérience de vie différente, une façon de s'exprimer différente et peux t'amener à découvrir quelque chose sur toi-même.
Je te suggère fortement de lire "Comment gérer les personnalités difficiles" aux éditions Odile Jacob, ce livre parle de tous les gens qui nous font sentir mal, de pourquoi ils agissent comme ça, et comment on peut dealer avec eux pour mettre nos limites en ménageant les dégâts.
Ce que tu appelles l'autorité, c'est en fait, une autorité abusive, il y a moyen de respecter les autres et d'être respecté, certaines situations sont plus délicates, mais ça s'apprend.
Si un jour tu veux voir quelqu'un qui fait de la relation d'aide, je te suggère d'aller vers une thérapie d'affirmation de soi, d'approche cognitive et humaniste. On travaille sur la vision du monde, sur nos pensées qui nous nuisent, on apprend à les détecter et les modifier. On apprend à détecter nos patterns, à comprendre pourquoi on reproduit toujours la même erreur sans le vouloir.
Là tu as clairement besoin de t'exprimer, c'est bien, mais ne t'isole pas, peut-être qu'aller dans un groupe d'entraide pourrait t'aider, on se rend compte qu'on est pas seul, on apprend à partager notre vécu et écouter. On apprend à prendre sa vie en main, ne plus être une victime, se responsabiliser. Car sous toute cette haine envers les autres se cache la haine de soi-même, le sentiment qu'on ne vaut pas grand chose, qu'on est incompris, qu'on ne peut rien y faire. Lorsqu'on arrive à parler au je, je me sens...lorsqu'on arrive à refaire confiance aux autres et à la vie pcq une orreille attentive apparaît...beaucoup de choses peuvent changer. Bon courage, la vie est plein de surprises et pas que des mauvaises, mais sois à l'écoute des occasions qui frappent à ta porte.
Autre chose, j'ai lu cet exercice sur ce site, mais j'ai une amie qui l'a pratiqué sur recommandation d'un psy, suite à un burn-out, et je peux te dire que le résultat est impressionnant! Il s'agit de faire l'exercice d'écrire chaque jours 3 événements positifs survenus dans la journée et d'y écrire en quoi tu y as contribué. Bon, au début si c'est trop tof, tu peux écrire juste des choses agréables même si tu n'en est pas responsable, du genre "aujourd'hui il a fait super beau, ça m'a mis un peu de bonne humeur". À la longue ça deviendra plus concret, du genre "aujourd'hui j'ai réussi à reparler à cette fille avec qui je m'étais brouillé mais que je trouve intéressante, je suis fier de moi et elle avait l'air contente de me voir". Je sais, ça paraît con, mais ça marche! ça va te montrer l'impact que tu as sur ce qui t'entoure, ça va te faire insister sur le positif, t'obliger à y réfléchir, à te rendre compte de ce qui te rend heureux, de tes désirs, tes rêves et ta capacité à agir pour les réaliser. Prend vraiment le temps de le faire, même si tu n'en as aucune envie et que tu ne vois pas ce que tu peux écrire, si une journée tu es moins inspiré, c'est pas grave. Si une autre journée tu as plus que 3 choses positives, ne te gêne pas, note-les! Pour ma part, quand c'est une journée de merde, il m'est souvent arrivé d'écrire "il y a eu telle ou telle chose qui a merdé, mais telle personne m'a donné du soutien, ou telle toune a joué ça m'a fait du bien, ou j'ai fait telle chose et ça a passé". Ça donne du recul, ça montre qu'on s'en sort.
Bon, ça t'en as fait long à lire à toi aussi, n'est-ce pas? J'aurais pu être plus brève, mais ça m'a fait du bien de refaire un bilan de mon histoire. Tu peux aussi lire Boris Cyrulnik qui écrit à propos de la résilience, cette capacité qu'on des gens très traumatisés à s'en sortir malgré tout, et parfois très bien. C'est très inspirant. Moi ça m'a fait un bien fou de lire que tout n'est pas perdu, même après les pires humiliations quand on trouve une main tendue et des occasions de se développer et donner du sens à ce qu'on a vécu.
Bye, prend soin de toi et donne des nouvelles si tu veux, confiance!