Les enregistrements vidéo que Cho Seung-Hui a postés à NBC durant l'intervalle de deux heures séparant les deux épisodes de fusillade donnent des indications sur les troubles que peut présenter un tel tireur, considèrent des experts en psychologie légale.
Le New York Times a interrogé des experts sur les diagnostics en santé mentale qui pourraient possiblement s'appliquer.
"Il y a une multitude d'étiquettes possibles et l'exercice peut n'avoir aucun sens", considère Robert Hare, un expert en comportement violent qui a été consultant pour le F.B.I. et qui a créé un modèle pour la détection de la psychopathie qui fait autorité. Un diagnostic requière du temps et l'accès au patient dont l'histoire peut être aussi importante que les actions".
Les opinions tournent autour de quelques diagnostics tels que "dépression psychotique", "trouble de la personnalité évitante" et "schizophrénie de type paranoïde".
Dr. Michael Stone, professeur en psychiatrie clinique à l'Université Columbia et expert des troubles de la personnalité et de la psychologie des tueurs, a dit en interview qu'il voyait dans les vidéos, "une personne paranoïde avec des traits sadiques, possiblement psychotique". "Il y a des gens", a-t-il dit, "qui peuvent voir des conspirations tout autour, et qui ont si peu d'empathie qu'ils peuvent faire les choses les plus haineuses presque comme s'ils étaient en train de tailler du bois". "Ce manque d'empathie", dit-il, "ne définit cependant pas un seule maladie mentale".
Il voyait, dans la vidéo, un homme caractérisé fondamentalement par un sentiment d'impuissance. "Pendant 23 ans, il était impuissant, et pendant 2 heures de sa vie, il était un homme puissant."
La vidéo et les descriptions faites par ses pairs de classe, suggèrent un mélange de problèmes de personnalité sévères et spécifiques, selon Dr. Theodore Millon, doyen et directeur scientifique de l'Institute for Advanced Studies in Personology and Psychopathology en Floride.
"Les gens qui ont un trouble de la personnalité évitante fuient les situations sociales à cause d'une peur paralysante de la désapprobation et de la critique. Ceux qui ont un trouble de la personnalité paranoïde (ou paranoïaque) nourrissent une profonde méfiance des autres et voient des insultes et des intentions malveillantes dans presque toutes les interactions. Les deux sont des modes ancrés de comportements qui peuvent commencer à l'adolescence ou plus tôt."
Dans son livre “Disorders of Personality” (Wiley, 1996), Dr. Millon identifie un amalgame de ces deux troubles qu'il désigne sous le terme de trouble paranoïde borné (“insular paranoid” disorder). "Ces gens se sentent persécutés et profondément isolés, ils sentent que le monde les rejette et ils vont souvent remplacer le monde réel par un monde intérieur dans lequel ils mettent en oeuvre leurs fantaisies", explique Dr. Millon. Il est cependant très rare qu'ils vont confondre la réalité et leur monde intérieur.
C'est à l'âge de jeune adulte que se produit souvent la première crise psychotique chez les gens ayant un diagnostic de schizophrénie, un trouble caractérisé notamment par des illusions, des hallucinations et des voix imaginaires. Certaines actions de M. Cho suggèrent cette rupture avec la réalité, considèrent quelques experts, dont Dr. Frank Ochberg du Dart Center for Journalism and Trauma.
Selon Dr. Hare, "la question est de reconnaître les traits qui vont conduire à la violence. La plupart des signes d'avertissement apparaissent rétrospectivement", dit-il, "et plusieurs des traits de M. Cho n'étaient pas si exceptionnels. La population des tueurs est très petite et personne ne sait quelle est la prévalence de leurs traits communs dans la population en générale." "Nous devons essayer de comprendre", dit-il. "La recherche de base peut être faite".
Source: JOHN SCHWARTZ and BENEDICT CAREY, Experts Shy From Instant Diagnoses of Gunman’s Mental Illness, but Hints Abound, New York Times, 20 avril 2007.