L’activation du système immunitaire est modulée selon le moment de la journée, montre une étude publiée en octobre 2021 dans la revue Nature Immunology.
Pour comprendre le rôle des rythmes circadiens dans la réponse immunitaire, Christoph Scheiermann, professeur d'immunologie à l’Université de Genève (UNIGE), et ses collègues se sont penchés sur la migration des cellules dendritiques de la peau dans le système lymphatique.
Les cellules dendritiques sont des cellules du système immunitaire inné impliquées dans le déclenchement de la réponse immunitaire adaptative.
« Contrairement au système immunitaire inné qui réagit immédiatement mais de manière peu ciblée, le système immunitaire adaptatif construit une réponse sur le long terme spécifique à chaque agent infectieux
», explique le communiqué de l'UNIGE. Il « prend des semaines à former une réponse propre à tel ou tel pathogène, mais celle-ci perdure ensuite longtemps grâce à un mécanisme de mémoire cellulaire
».
« C’est typiquement le mécanisme à l’œuvre lors de la vaccination contre un virus, par exemple.
»
Situées dans de nombreux organes périphériques, dont la peau, les cellules dendritiques ont pour fonction de migrer au travers des vaisseaux lymphatiques vers les ganglions, où les antigènes (substance susceptible d'être reconnue par le système immunitaire) sont présentés, afin de déclencher une réponse immunitaire contre l’arrivée d’un pathogène.
Des horloges synchronisées
Les chercheurs ont tout d’abord observé quatre fois par jour la capacité migratoire des cellules dendritiques de souris standards, puis de souris dépourvues d’horloges internes fonctionnelles.
« Pour que la migration cellulaire puisse avoir lieu correctement, il faut non seulement que les cellules dendritiques répondent à une rythmicité circadienne, mais aussi les cellules des vaisseaux lymphatiques
», précise Stephan Holtkamp de l’Université Ludwig-Maximilian de Munich et premier auteur.
L’horloge circadienne doit donc être fonctionnelle des deux côtés du mécanisme : sur la cellule comme dans son environnement. Dans le cas contraire, les pics d’activités n’ont plus lieu et le système immunitaire fonctionne au ralenti.
Les chercheurs ont ensuite mené une expérience sur des cellules de peau humaine, prélevées sur des patient-es à différents moments de la journée. « Nous avons identifié de nombreuses molécules, notamment des chimiokines (ou chémokine), qui participent au processus migratoire et dont l’expression est régulée par les horloges circadiennes
», indique Christoph Scheiermann.
Les mêmes molécules ont été retrouvées dans les cellules humaines et les cellules de souris avec un rythme inversé, nocturne pour les rongeurs, diurne pour les humains. « Cela confirme bien que ce rythme est régi par l’activité naturelle en fonction de l’alternance du jour et de la nuit.
»
Stimuler le système immunitaire à une heure favorable
Des données complémentaires indiquent que si l’on stimule le système immunitaire à différents moments de la journée, les mêmes oscillations apparaissent, avec un pic le matin.
Mais pourquoi le système immunitaire est-il régi par un rythme oscillatoire ?
«
Les rythmes circadiens fonctionnent comme un système d’économie de l’énergie pour utiliser au mieux les ressources énergétiques selon les besoins les plus immédiats. Serait-ce, alors, le moyen pour le système immunitaire de se mettre sur le qui-vive aux moments où le risque d’exposition à des pathogènes est le plus grand, par le biais de l’ingestion de nourriture et/ou des interactions sociales ?», s’interroge Christoph Scheiermann.
« Sur le même principe, pourrions-nous être plus vulnérables à des pathogènes le soir et la nuit ? Impossible, pour l’instant, de le dire.
»
« Néanmoins, l’importance du rythme circadien sur le système immunitaire commence à peine à se dévoiler et pourrait être majeure, tant pour la vaccination préventive que pour l’administration de thérapies antitumorale ou la prise en charge de maladies auto-immunes
», soulignent les chercheurs.
Pour plus d'informations sur les rythmes circadiens du système immunitaire, voyez les liens plus bas.
Psychomédia avec sources : Université de Genève, Nature Immunology.
Tous droits réservés.