« La curiosité et la recherche d'information façonnent de façon puissante notre comportement et il est considéré qu'elles sont basées dans le cortex frontal. Mais les régions frontales et la dynamique des neurones qui contrôlent la décision de vérifier les informations restent inconnues.
»
Emmanuel Procyk et ses collègues de l'Inserm/Université Claude Bernard Lyon 1 ont mené cette étude avec des mamacaques équipés d'électrodes enregistrant l'activité de leur cortex frontal. « Plus précisément, nous avons enregistré l'activité de 411 neurones dans deux régions du cortex frontal, connues pour leur implication dans la prise de décision : le cortex cingulaire moyen et le cortex préfrontal latéral
», indique le chercheur.
Pour étudier ces neurones au moment où les singes décident de vérifier quelque chose, l'équipe a développé un protocole qui pourrait être appelé : « travailler ou vérifier
». À chaque essai, les singes ont deux options : travailler à une tâche de mémorisation visuelle ou vérifier une jauge qui indique combien de temps il faut attendre avant de pouvoir obtenir une récompense (jus de fruit). Enchaîner correctement les étapes de la tâche principale fait grimper la jauge...
Lorsque les macaques vérifiaient le niveau de la jauge, les neurones du cortex cingulaire moyen étaient d'abord activés, et, 500 millisecondes après, ceux du cortex préfrontal latéral. Grâce à des outils statistiques, l'équipe est parvenue à prédire correctement l'imminence d'une vérification... jusqu'à une seconde avant que les singes effectuent le mouvement pour vérifier le niveau de la jauge.
L'étude montre que ces voies neuronales de la vérification sont différentes de celles impliquées dans d'autres types de décisions, par exemple lorsque les macaques décident d'appuyer sur un bouton pour répondre à une question du test de mémoire visuelle.
Un dérèglement de ce mécanisme cérébral pourrait expliquer les vérifications compulsives des personnes atteintes de troubles obsessionnels compulsifs (TOC), estiment les chercheurs. Certaines études ont d'ailleurs montré une altération du cortex cingulaire chez celles-ci.
Des chercheurs américains tentent déjà de traiter les TOC en détruisant certaines parties du cortex cingulaire avec des électrodes. Cette technique d'électrocoagulation ne serait efficace que chez 30 à 40 % des patients résistants aux autres traitements disponibles. Un manque de précision concernant les zones du cortex cingulaire ciblées pourrait expliquer le manque d’efficacité de l’approche, estiment les chercheurs.
De leur côté, les chercheurs français viennent de lancer un projet visant à identifier précisément les zones du cortex cingulaire impliquées dans les TOC chez l'Homme, sur une vingtaine de volontaires, et à évaluer l’impact d’une altération du cortex cingulaire correspondant chez des macaques.
Si cette piste se confirme, elle pourrait ouvrir la voie au développement de traitements spécifiques pour réguler l'activité du cortex cingulaire dans les TOC : « médicaments, électrostimulation, électrocoagulation plus précise… ?
»
Psychomédia avec sources : Inserm, Nature Communications.
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