Le psychiatre américain Aaron T. Beck, un pionnier important de la psychologie cognitive et de la psychothérapie cognitivo-comportementale, « a révolutionné l'étude scientifique de la dépression et ses recherches ultérieures ont élucidé des mécanismes biologiques qui sous-tendent certaines caractéristiques cognitives de la maladie
».
Aujourd'hui âgé de 95 ans, il vient de publier, avec son collègue Keith Bredemeier de l'Université de Pennsylvanie, un article visant à présenter une théorie unifiée et globale de la dépression.
L'article, intitulé « Un modèle unifié de la dépression : Intégration des perspectives clinique, cognitive, biologique et évolutionniste » (1), est publié dans la revue Clinical Psychological Science.
Le modèle est fondé sur la prémisse que la dépression représente une adaptation à la perte perçue de ressources vitales qui donnent accès aux moyens de répondre aux besoins essentiels de la vie (perte d'un membre de la famille, d'un partenaire romantique, d'un groupe d'appartenance, d'un emploi, de la santé…)
Pour les personnes qui sont plus à risque de dépression sévère en raison de facteurs génétiques ou environnementaux spécifiques, cette perte est plus susceptible d'être considérée comme dévastatrice et insurmontable. (Test : quelle est la sévérité de votre dépression ?)
Une réactivité accrue au stress et/ou des distorsions cognitives enracinées amènent ces personnes à risque à épouser des croyances négatives sur soi, le monde et l'avenir - une combinaison que Beck a appelée la « triade cognitive négative » (mesurée par ce test). Ces tendances sont médiées par des altérations dans des zones ou des circuits du cerveau impliqués dans la régulation de la cognition et des émotions.
Quand ces croyances sont activées (par exemple, par des événements stressants de la vie), elles déclenchent des émotions comme la tristesse, l'anhédonie, et la culpabilité, ainsi que des réponses comportementales et physiologiques, comme le retrait, l'inactivité et la perte d'appétit.
Au fil du temps, ce « programme » renforce les croyances négatives qui mettent les gens à risque de dépression en premier lieu. Il peut être arrêté lorsque les ressources vitales sont restaurées, soit parce que de nouvelles informations « corrigent » les biais négatifs ou parce que la situation se modifie.
Des facteurs externes tels que le soutien des amis et de la famille, les conseils d'un psychothérapeute et un traitement biologique (par exemple, des médicaments) peuvent aider à arrêter le cycle de la dépression.
« Notre modèle suggère que toute intervention qui cible des facteurs clés, prédisposants, précipitants ou de résilience, peut réduire le risque ou atténuer les symptômes
», expliquent Beck et Bredemeier.
La fonction primordiale de ce « programme de dépression », selon la perspective évolutionniste des chercheurs, est de promouvoir la conservation de l'énergie face à la perte perçue de ressources. Il était probablement adaptatif au cours de l'évolution, mais devient inadapté à l'époque contemporaine.
Pour plus d'informations, voyez les liens plus bas.
Voyez également :
- La thérapie cognitivo-comportementale efficace contre la dépression résistante aux antidépresseurs
- Symptômes et critères diagnostiques de la dépression
- Le psychiatre Aaron Beck, 85 ans, récipiendaire d'un prestigieux prix
(1) « A Unified Model of Depression: Integrating Clinical, Cognitive, Biological, and Evolutionary Perspectives ».
Psychomédia avec sources : Association for Psychologial Science, Clinical Psychological Science.
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