Cette étude a été menée avec 30 000 joueurs à des jeux en réseau multi-joueurs (EverQuest, Dark Age of Camelot, Ultima Online et Star Wars Galaxies) ayant répondu à des enquêtes sur différents sites de jeux. Les données ont été recueillies de 2000 à 2003, c'est-à-dire avant l'arrivée des jeux les plus récents, comme World of Warcraft (2004), qui connaissent des succès encore plus importants et rejoignent des couches encore plus larges de la population.
La moyenne d'âge des répondants était de 26 ans et demi. L'étendue allait de 11 à 68 ans. Seulement 25% des joueurs étaient des adolescents.
50% des répondants travaillaient à temps plein, 36% étaient mariés et 22% avaient des enfants. Des adolescents, des étudiants, des jeunes professionnels, des femmes à la maison d'âge moyen aussi bien que des retraités se retrouvent dans ces univers virtuels.
La temps consacré au jeu était en moyenne 23 heures par semaine. Environ 8% des joueurs passaient 40 heures ou plus. 60% des joueurs avaient déjà passé 10 heures continues à jouer. Il n'y avait pas de différence dans le temps consacré selon l'âge, ce qui montre, considère l'auteur, que ces jeux exercent le même attrait pour l'adolescent et pour le retraité.
Investissement émotionnel dans les jeux
L'attrait et l'importance de ces jeux sont aussi démontrés par l'investissement émotionnel des joueurs.
Quand on demandait aux répondants si l'expérience la plus positive et l'expérience la plus négative des 7 derniers jours s'étaient produites dans la vraie vie ou dans le jeu, environ 30% répondaient qu'elles s'étaient produites dans le jeu.
Ces expériences tournaient autour de l'interaction avec d'autres joueurs : une action altruiste inattendue et courageuse ou encore une action égoiste et nuisible.
Agréments et motivations
L'analyse des témoignages des joueurs fait ressortir 5 types de motivations (ou sources d'agrément) qui se retrouvent à divers degrés chez les joueurs:
Le désir d'interagir et de former des relations significatives qui sont supportantes et qui incluent un certain degré de dévoilement de sa vie réelle. Pour les gens chez qui cette motivation domine, se perfectionner dans le jeu permet d'avoir l'occasion d'interagir de façon plus significative et satisfaisante.
La manipulation, c'est-à-dire la tendance à manipuler les autres joueurs pour des gains et la satisfaction personnels. Ceux pour qui cette motivation est forte aiment tromper, arnaquer, railler et dominer les autres.
L'immersion dans un monde fantaisiste où l'on est quelqu'un d'autre. Les gens qui aiment particulièrement cet aspect aiment l'histoire et créer des avatars (personnages) qui enrichissent l'histoire. Ils peuvent aimer explorer différentes identités.
L'évasion des stress et des problèmes de la vie réelle. Dans ces univers, on ne retrouvent pas certains problèmes et difficultés de la vie réelle.
L'accomplissement, le désir de devenir plus puissant dans l'environnement virtuel en atteignant des buts et en accumulant des items. Les gens aiment progresser, acquérir des compétences, devenir capables de maîtriser certaines situations, etc.
La recherche montre que les hommes, en général (mais pas toujours), sont plus motivés par l'accomplissement et la manipulation alors que les femmes sont plus attirées par les relations, l'immersion et l'évasion. Ainsi, les hommes jouent davantage pour atteindre des buts dans le jeu et les femmes pour créer des relations et s'immerger dans un environnement fantaisiste.
Importance des relations de jeux
Beaucoup de joueurs valorisent les amitiés de jeux. 39% des hommes et 53% des femmes considèrent qu'elles sont comparables à celles de la vie réelle ou meilleures. 16% des hommes et 5% des femmes ont rencontré en personne quelqu'un qu'ils ont d'abord connu dans les jeux.
Une caractéristique particulière des jeux vidéo pour la formation de relations, mentionne l'auteur, est la grande fréquence de scénarios de situations de crise qui requièrent la collaboration entre joueurs et la confiance.
Par ailleurs, plusieurs joueurs participent à ces jeux avec leur partenaire amoureux ou un membre de la famille. 16% des hommes et 60% des femmes jouent avec leur partenaire amoureux et 26% des hommes et 40% des femmes jouent avec membre de la famille. L'auteur rapporte des témoignages selon lesquelles leurs relations virtuelles ont été enrichissantes pour les relations dans la vraie vie (par exemple des parents rapportent avoir transcendé la relation parent-enfant de façon intéressante).
Enfin certains joueurs rapportent que les relations de jeux leur permettent de pratiquer et développer des habiletés plus ou moins transférables dans la vraie vie telles que des habiletés de collaboration et de leadership.
Source: Nicholas Yee, The Psychology of Massively Multi-User Online Role-Playing Games: Motivations, Emotional Investment, Relationships and Problematic Usage in Avatars at Work and Play: Collaboration and Interaction in Shared Virtual Environments, Schroder, R. & Axelsson, A., London: Springer-Verlag, 2006.
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