Les mécanismes régulant le sommeil durant toute la vie se mettrait en place au cours de l’enfance suggère une étude menée par l'équipe de la neurobiologiste Joëlle Adrien de l’Inserm.
L'étude suggère aussi que l’exposition à des antidépresseurs durant cette période pourrait amener une tendance durable à l’insomnie et à la dépression.
«Le sujet se lève fatigué au point qu’on a longtemps pensé que l’insomnie provoque la dépression, relève Joëlle Adrien. On sait aujourd’hui que l’insomnie est l’un des symptômes majeurs de la dépression mais n’en est pas la cause.»
Il y a, dans la dépression et les troubles du sommeil, un dysfonctionnement du système de régulation d’une substance libérée dans le cerveau par les neurones : la sérotonine. Au cours de la dépression comme de l’insomnie, ce système fonctionne au ralenti.
Les chercheurs ont mené une double série d’expériences avec des souris. Tout d’abord,«nous avons travaillé sur des souris déprimées à cause d’une altération génétique de la régulation de la sérotonine», explique Mme Adrien. Celles-ci affichent un comportement caractéristique de la dépression : par exemple, elles ne cherchent pas à se sortir d’une situation désagréable. Et elles ont des troubles du sommeil.
«Nous avons découvert que si on les traite, au cours de leurs quatre premières semaines de vie (l’équivalent de l’âge prépubère chez l’homme) avec des antidépresseur qui rétablissent le fonctionnement de la sérotonine, leur défaut génétique est comme effacé, pour la vie ! Les troubles du sommeil et de l’humeur sont définitivement corrigés. En revanche, si on intervient plus tard, l’effet bénéfique est temporaire.»
Ensuite, les chercheurs ont fait l’expérience inverse : ils ont donné ces mêmes antidépresseurs à des souriceaux normaux. Leur taux de sérotonine, normal, est devenu anormal.
Résultat : des troubles du sommeil à vie. Là encore, le même traitement sur des souris adultes n’a pas eu d’effet durable. Ainsi, il apparaît que l’enfance est un temps de construction du sommeil, et une fenêtre de vulnérabilité à son dérèglement durable.
Les résultats de cette étude, publiés dans Journal of Neuroscience, donnent une indication forte des risques que présentent, pour l’enfant et le préadolescent, la prise d’antidépresseurs, dit Mme Adrien. Ils invitent aussi à interroger la prescription d'antidépresseurs aux femmes enceintes ou qui allaitent.
PsychoMédia avec source:
Libération
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