La dépression est associée à des déficits en sérotonine, un des neurotransmetteurs essentiels aux communications entre les neurones, impliquée notamment dans les comportements alimentaires et sexuels, le cycle veille/sommeil, la douleur, l’anxiété et les troubles de l’humeur, indiquent des chercheurs de l'Institut national français de la santé et de la recherche médicale (INSERM) dont des travaux récents, publiés dans la revue Science, apportent un nouvel éclairage sur les mécanismes d’action des antidépresseurs.
Les antidépresseurs développés depuis les années 60 visent principalement à augmenter la quantité de sérotonine libérée aux synapses entre les neurones (cellules nerveuses) où ont lieu les communications via les neurotransmetteurs.
Les équipes d’Odile Kellermann (Université Paris Descartes) et de Jean-Marie Launay Hôpital Lariboisière, Paris) viennent de caractériser les différentes réactions et molécules intermédiaires produites en présence du Prozac. Les mécanismes identifiés permettent d'expliquer la latence de l'action des antidépresseurs (quelques semaines).
Ils ont identifié le rôle clé d’un microARN, appelé miR-16. Ce microARN contrôle la synthèse du transporteur de la sérotonine. Dans des conditions physiologiques normales, ce transporteur est présent dans les neurones dit "à sérotonine". En revanche, l’expression de ce transporteur est réduite au silence par miR-16 dans les neurones dits "à noradrénaline", un neurotransmetteur impliqué dans l'attention, les émotions, le sommeil, le rêve et l'apprentissage.
En réponse au Prozac, les neurones à sérotonine libèrent une molécule-signal, qui fait chuter la quantité de miR-16, ce qui déverrouille l’expression du transporteur de la sérotonine dans les neurones à noradrénaline. Ces neurones deviennent ainsi sensibles au Prozac. Ils continuent à produire de la noradrénaline mais deviennent mixtes : ils synthétisent aussi de la sérotonine.
Au final, la quantité de sérotonine libérée est accrue à la fois au niveau des neurones à sérotonine via l’effet direct du Prozac qui empêche sa recapture et au niveau des neurones à noradrénaline via la diminution de miR-16.
Ainsi, les antidépresseurs sont capables d’activer une nouvelle source de sérotonine dans le cerveau, expliquent les chercheurs. L’efficacité du Prozac repose ainsi "sur les propriétés plastiques des neurones à noradrénaline, c’est-à-dire leur capacité à acquérir les fonctions des neurones à sérotonine".
Les chercheurs ont utilisé des cellules souches neuronales capables de se différencier en neurones qui fabriquent la sérotonine ou la noradrénaline. Les liens observés in vitro ont été validés in vivo chez la souris.
Illustration : Cellule nerveuse et synapse
Psychomédia avec source:
Inserm, communiqué
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