Une proposition de loi visant à renforcer la prévention et la répression des violences faites aux femmes était débattue jeudi 25 février à l'Assemblée. Ce texte met en œuvre les mesures annoncées en novembre dernier alors que les violences faites aux femmes ont été décrétées "grande cause nationale 2010".
Le texte, déposé par les députés Danielle Bousquet (PS) et Guy Geoffroy (UMP), crée notamment une "ordonnance de protection des victimes", permettant à un juge de statuer dans les 24 heures en cas d'urgence, un "délit de violence psychologique" (ou harcèlement conjugal), un délit de "contrainte au mariage", des mesures pour protéger les étrangères et la possibilité d'utiliser le bracelet électronique.
Le texte instaure la possibilité d'utiliser un bracelet électronique pour contrôler l'effectivité de la mesure d'éloignement du conjoint violent.
Pour ce qui est des violences psychologiques, les députés se sont inspirés de la définition du harcèlement moral, un délit créé en 2002, qui ne s’applique qu’au monde du travail. Seront donc considérées comme des violences psychologiques au sein du couple les "agissements ou les paroles répétés ayant pour objet ou pour effet une dégradation des conditions de vie de la victime susceptible de porter atteinte à ses droits et à sa dignité ou d’entraîner une altération de sa santé physique ou mentale". Les peines prévues pour ces violences sont trois ans d’emprisonnement et 75.000 euros d’amende.
Beaucoup de juristes restent cependant perplexes, rapporte Le Monde. Comment distinguer les violences psychologiques des altercations ou des tensions qui constituent souvent le lot des couples? "Il s’agit, une fois encore, d’une loi d’affichage et de communication, affirme Christophe Vivet, secrétaire national de l’Union syndicale des magistrats (USM). "Être désagréable de manière répétée, critiquer sans cesse sa compagne, est-ce une violence psychologique au sens pénal ? Il y a un vrai risque d’arbitraire dans ce texte qui va autoriser la justice à s’immiscer dans la vie privée des couples."
Des associations de femmes qui luttent contre ces violences défendent cette incrimination qui permettra, considèrent-elles, d’intervenir au sein du couple avant même que les coups pleuvent.
En ce qui concerne la protection des étrangères, la proposition de loi prévoit d'accorder ou de renouveler le titre de séjour des femmes venues en France au titre du regroupement familial, mais qui ont dû se séparer de leur mari en raison de violences. Un autre article permet la délivrance d'une carte de séjour aux personnes en situation irrégulière ayant subi des violences conjugales.
À la veille de l'examen de cette proposition de loi, Amnesty International a fait valoir dans un rapport qu'il rendait public que "l'efficacité de la politique de prévention et de lutte" est "conditionnée à une meilleure coordination des moyens mis en œuvre et à un financement adéquat de la part de l'État". Sans le financement nécessaire, "les plans de lutte ne peuvent ni se développer ni se révéler efficaces". Ainsi le la législation renforcée de 2006 n'aurait pas donné de "résultats satisfaisants" faute d'être "effectivement utilisée et appliquée avec rigueur". "Peu de victimes" accèdent à la justice: en 2007 et 2008, "moins de 10% des femmes victimes de violence commises par leur conjoint auraient porté plainte", indique le rapport.
Psychomédia avec sources:
Le Nouvel Observateur, Le Monde