Des chercheurs américains et français, dont les travaux sont rapportés dans la revue Science, ont réussi à réduire le comportement compulsif de souris modifiées pour présenter des comportements répétitifs pathologiques comparables à ceux observés chez les personnes atteintes d'un trouble obsessionnel-compulsif (TOC), confirmant ainsi un modèle neurologique du trouble.
Ils ont, pour cela, utilisée une technique d'optogénétique.
Développée depuis le milieu des années 2000, cette technique consiste à modifier génétiquement certaines cellules neuronales pour les rendre sensibles à la lumière afin de pouvoir les activer ou les inhiber à distance grâce à un rayon de lumière sans affecter les cellules voisines.
Les comportements répétitifs sont caractéristiques d’un certain nombre de maladies neuropsychiatriques, notamment du TOC où ils peuvent se développer de manière compulsive au point de devenir un véritable handicap pour la vie quotidienne (se laver les mains jusqu’à 30 fois par jour, vérifier à l’excès qu’une porte est bien verrouillée etc.), expliquent les chercheurs. Le TOC touche 2-3 % de la population, affectant ainsi plus d’un million de personnes en France, estiment-ils.
Le trouble est habituellement traité au moyen de médicaments tels que des antidépresseurs ou des neuroleptiques (antipsychotiques) et/ou de psychothérapies comportementales. Toutefois malgré ces traitements, des symptômes sévères persistent chez environ un tiers des patients. Il est donc nécessaire de mieux comprendre les mécanismes cérébraux.
De précédentes études ont identifié des dysfonctionnements dans des circuits de neurones situés entre l’avant du cerveau (cortex orbitofrontal) et des structures plus profondes (les ganglions de la base).
Dans cette nouvelle étude, Eric Burguière de l’Inserm et l'équipe du Pr Ann Graybiel du Massachusetts Institute of Technology de Boston, ont concentré leurs recherches sur ces circuits chez ces souris mutantes dont les comportements compulsifs se traduisent par des toilettages répétés tout au long de la journée pouvant entraîner des lésions cutanées.
Ces animaux n’expriment pas une protéine (en raison de l’absence du gène Sapap3) normalement présente dans les synapses des neurones du striatum, une structure faisant partie des ganglions de la base et associée à des fonctions telles que l’apprentissage de séquences, l’émergence d’habitudes, ou encore la prise de décision.
Des premières observations ont permis de montrer que l’émergence des compulsions chez les souris mutantes était due à un déficit d’inhibition comportementale. Les souris ne peuvent pas réprimer l’action de toilettage même lorsque cela n’est pas nécessaire. Des enregistrements de l’activité des neurones ont aussi montré que la défaillance de communication dans le cerveau entre le néocortex et le striatum conduit à une hyperactivité des neurones du striatum chez ces souris.
Pour vérifier cette hypothèse, les chercheurs ont eu recours à l’optogénétique afin de rendre les neurones précédemment identifiés sensibles à la lumière et de contrôler leur activité en les excitant ou en les inhibant via un faisceau lumineux.
Lorsque les neurones du cortex qui envoient des messages vers le striatum étaient excités par stimulations lumineuses, les comportements compulsifs étaient largement atténués. En dehors de ces périodes de stimulation, les comportements compulsifs réapparaissaient.
L'équipe de l’Inserm, dirigée par le Dr. Luc Mallet à l’Institut du Cerveau et de la Moelle épinière, poursuivra ces travaux chez des souris avec la technique d’optogénétique afin de mieux comprendre l’effet de ces stimulations et étudiera en parallèle les effets physiologiques et comportementaux de stimulation cérébrale profonde chez des personnes souffrant de TOCs.
Ces travaux se poursuivent grâce à une aide apportée par la fondation FondaMental.
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