"Plusieurs adolescents très bien adaptés socialement et très conscients des comportements attendus de leur part constituent un groupe particulièrement à risque de s'adonner à la consommation de drogue et d'alcool", selon une étude du département de psychoéducation de l'Université de Montréal à paraître dans un ouvrage collectif portant sur la résilience.
Jean-Sébastien Fallu de l'Université de Montréal et ses collègues ont "observé une corrélation entre la consommation de drogue et d'alcool et la popularité au sein de ce groupe particulier de jeunes".
"Les adolescents en question sont issus de milieux socioéconomiques favorisés et sont ceux avec qui les autres élèves préfèrent travailler. «Ils sont aussi très sensibles aux codes sociaux et savent ce qu'il faut faire pour être populaires», précise le professeur.
Cette ouverture à l'égard de ce que l'entourage attend d'eux les amène à respecter les règles du monde des adultes, mais les rend influençables relativement à ce qui est valorisé chez les adolescents dont l'usage de drogue et d'alcool. «Ils sont donc plus portés à consommer que les autres adolescents», affirme le professeur.
Augmentation du double
Afin de clarifier deux théories sur l'influence des amis quant à la consommation, le professeur Fallu et quatre autres collègues de l'UdeM et de l'Université d'Oslo ont cherché à savoir si la popularité pouvait avoir un effet d'entrainement sur la consommation à la fois de cannabis, d'alcool et de drogues dures.
L'étude longitudinale a examiné la consommation de ces substances et la popularité du jeune et de ses amis à trois moments, soit à 10, 12 et 15 ans. Plus de 500 élèves francophones d'une même ville et d'une même école secondaire ont participé à l'étude.
Comme on pouvait s'y attendre, les données montrent une augmentation de la consommation entre 10 et 15 ans quel que soit le niveau de popularité. Mais plus un adolescent et ses amis sont populaires, plus la hausse de la consommation est importante.
Les adolescents les plus populaires et dont les amis le sont aussi se démarquent nettement de l'ensemble: pour ceux du groupe qui se trouvent à l'extrémité la plus élevée de l'échelle de consommation, l'accroissement entre 10 et 15 ans est deux fois plus élevé que chez les autres.
Cette tendance ne se manifeste pas chez les adolescents qui sont populaires mais dont les camarades à l'école jouissent d'une moins grande popularité; dans leur cas, le profil de consommation est le même que pour l'ensemble des élèves non populaires.
La popularité semble donc exercer un effet d'entrainement chez les adolescents qui bénéficient d'une renommée, surtout si les amis sont tout aussi populaires et consomment eux aussi. «Leur sensibilité aux codes du groupe les rend plus vénérables à l'influence des autres, souligne Jean-Sébastien Fallu. Ils ne consomment pas pour faire partie d'un groupe ou pour gagner en popularité, mais pour demeurer dans le camp des populaires. C'est plus un phénomène de maintien du prestige que d'augmentation de celui-ci.»
Le phénomène a été observé tant chez les filles que chez les garçons.
Un groupe à surveiller
Puisque la popularité associée à la sensibilité aux normes sociales accroit le risque de consommation d'alcool et de drogue, les jeunes qui présentent ce profil devraient faire l'objet d'une surveillance attentive surtout s'ils consomment déjà, convient le professeur. Cette surveillance devrait être particulièrement vigilante au passage de l'école primaire à l'école secondaire, alors que le réseau social se redéfinit et s'élargit.
Quant aux jeunes moins populaires, ils ne sont évidemment pas à l'abri des déviances. D'autres études sur le sujet montrent qu'ils sont plutôt enclins à adopter des comportements violents qu'à commettre des délits mineurs comme la consommation de cannabis.
Les résultats de cette étude paraitront au cours de la prochaine année dans un ouvrage collectif portant sur la résilience. Deux autres professeurs de l'École de psychoéducation y ont participé, soit Frank Vitaro et Stéphane Cantin, ainsi que Frédéric Brière, chargé de cours à la même école."
Psychomédia avec source: Université de Montréal.
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