« Quels sont les traitements que les personnes souffrant de syndrome de fatigue chronique devraient suivre ? Plusieurs grandes organisations médicales en citent deux : la psychothérapie et une augmentation graduelle de l'exercice.
»
« Mais il y a un problème
», rapportent Julie Rehmeyer et David Tuller (1) dans le New York Times. L'étude principale qui est citée comme preuve de l'efficacité de ces traitements « surestimait certains de ses résultats.
En réalité, la prétention que les patients peuvent se remettre avec ces traitements n'est pas justifiée par les données. »
C'est ce que montre une réanalyse préliminaire des données de cette étude (nommée PACE) qui a été publiée dans le Lancet en 2011 et dans la revue Psychological Medicine en 2013.
Des patients se sont battus pendant des années pour obtenir les données, et au printemps dernier, un tribunal en Grande-Bretagne a ordonné la diffusion de certaines informations de l'étude.
L'approche de l'exercice graduel peut être dommageable. Selon un rapport de 2015 de l'Institute of Medicine (IOM), qui est maintenant la National Academy of Medicine, même une activité minime peut causer un épuisement prolongé, des douleurs musculaires, des problèmes cognitifs… (2). Les patients rapportent régulièrement une détérioration après un programme d'exercice gradué.
L'intervention psychothérapeutique encourage également les patients à augmenter leur niveau d'activité en combattant notamment les supposées fausses croyances sur la capacité et les conséquences de faire de l'exercice. (3)
Lorsque les résultats de l'étude ont été publiés pour la première fois, des patients et certains scientifiques ont noté un problème étonnant, est-il rapporté dans le New York Times : les chercheurs ont affaibli leurs mesures des résultats comparativement au protocole établi au départ à tel point que les participants pouvaient avoir connu une détérioration de leur fonctionnement physique et se qualifier pour être considérés comme ayant récupéré. Selon cette mesure modifiée, 13 % rencontraient d'ailleurs le critère de récupération dès le début de l'étude.
En décembre 2016, la revue Fatigue : Biomedicine, Health and Behavior a publié la nouvelle analyse de certaines données. Alors que les chercheurs affirmaient dans la revue Psychological Medicine que 22 % des participants ayant subi les traitements de psychothérapie ou d'exercice gradué avaient « récupéré » de leur maladie, la réanalyse constate, en utilisant la définition originale, 7 % ou moins ont récupéré, ce qui ne représentait pas une différence statistiquement significative avec ceux qui n'avaient pas reçu de traitement.
La semaine dernière, le site Virology Blog a publié une lettre ouverte à la revue Psychological Medicine, qui a été signée par plus de 100 cliniciens, scientifiques, experts et groupes de patients, demandant « la rétraction des résultats de l'étude afin de protéger les patients contre des traitements nuisibles et potentiellement dommageables
».
Dans le Lancet, il était affirmé que près de 60 % des participants à l'exercice graduel et à la psychothérapie s'étaient améliorés. Mais selon une récente réanalyse de leurs données par les chercheurs eux-mêmes, en utilisant leur mesure de l'amélioration plus stricte du début de l'étude, seulement 20 % recevant chaque thérapie en plus de soins médicaux s'étaient « améliorés » et la moitié de ceux-ci se seraient améliorés avec les soins médicaux seuls (comme le montrent les résultats du groupe n'ayant pas subi ces traitements).
Même cette conclusion limitée est discutable, ajoutent les auteurs de l'article du New York Times. Les résultats étaient fondés en grande partie sur l'autoévaluation subjective des participants, qui sont vulnérables au biais. Aucune des mesures objectives de l'essai n'étayait les allégations de succès du traitement.
Pour plus d'informations sur le syndrome de fatigue chronique, voyez les liens plus bas.
(1) Julie Rehmeyer, atteinte du syndrome et auteure du livre à venir « Through the Shadowlands: A Science Writer’s Odyssey Into an Illness Science Doesn’t Understand ». David Tuller est coordonnateur du programme de santé publique et journalisme à l'Université de Californie à Berkeley.
(2) Dans ce rapport, l'IOM recommandait que la maladie soit renommée maladie de l'intolérance systémique à l'effort, un terme reflétant le symptôme de base qui est une diminution soutenue de l'énergie après une activité minimale, appelée malaise post-effort. De nouveaux critères diagnostiques étaient aussi proposés.
(3) Une approche de psychothérapie peut potentiellement être pertinente lorsqu'elle vise l'adaptation à la maladie mais elle ne peut d'aucune façon être curative.
Psychomédia avec sources : New York Times.
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