Un nouveau centre de traitement du cancer dédié à l’hadronthérapie, le Cyclhad, a été inauguré le 5 juillet à Caen, rapporte le Journal du CNRS.
Il s'agit du 3e en France, les 2 autres étant le Centre de protonthérapie de l’Institut Curie à Orsay et le Centre Antoine-Lacassagne à Nice.
Ce nouveau centre « permettra de traiter des patients dès la mi-juillet, au rythme de 345 par an à terme, dont un tiers seront des enfants », précise Philippe Lagalle, président- directeur général de la société Cyclhad.
L’hadronthérapie est une nouvelle forme de radiothérapie : comme la radiothérapie conventionnelle, elle consiste à irradier les cellules tumorales avec un faisceau de particules pour les détruire. Mais plutôt qu'utiliser des photons de haute énergie (ou rayons X), « l’hadronthérapie repose sur des ions chargés positivement, notamment des ions hydrogènes ou “protons” – c’est la protonthérapie –, et des ions carbone – c’est la carbonethérapie », explique Daniel Cussol, physicien nucléaire au Laboratoire de physique corpusculaire de Caen.
Sur les 384 000 personnes touchées par le cancer chaque année en France, 150 000 sont traitées par radiothérapie, seule ou associée à la chimiothérapie ou à la chirurgie. L’hadronthérapie pourrait concerner 15 000 patients chaque année.
« Celle-ci est particulièrement indiquée pour les tumeurs résistantes à la chimiothérapie et à la radiothérapie, ou inopérables du fait de leur localisation près de tissus vitaux : tumeurs cérébrales, du crâne, de la face ou du cou, près du cœur ou de l’œil, etc. », explique Jacques Balosso, cancérologue et radiothérapeute au CHU de Grenoble.
Les ions, constitués de protons et de neutrons (des particules élémentaires appartenant à la famille des hadrons, d’où le nom de la technique) sont accélérés dans des appareils énormes, de quelques mètres à une vingtaine de mètres de diamètre : des synchrotrons ou des cyclotrons. Et ce, à des vitesses pouvant atteindre 73 % de la vitesse de la lumière, soit 219 000 kilomètres par seconde. Puis ils sont concentrés en un faisceau de moins d’un millimètre de diamètre permettant d’irradier les tumeurs.
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Comparés aux rayons X, les faisceaux d’hadronthérapie sont en théorie plus précis. Concernant spécifiquement les ions carbone, ils seraient aussi plus efficaces. Mais surtout, “les ions chargés délivrent la majorité de leur énergie au niveau de la tumeur visée. Ce qui permet de maximiser les dégâts au niveau de la tumeur, tout en préservant au mieux les cellules saines autour”, précise Daniel Cussol.Proposée dès 1946 par le physicien américain Robert Wilson, la protonthérapie fut utilisée pour la première fois sur des patients en 1954, aux États-Unis ; et la carbonethérapie en 1975, aux États-Unis également. Depuis, “environ 150 000 patients ont été traités par protonthérapie dans le monde, dont près de 14 000 en France ; et 23 000 par ions carbone, dont 20 000 rien qu’au Japon, leader dans ce domaine”, dénombre Jacques Balosso. »
« Restent cependant de nombreuses questions en suspens qui constituent autant de défis pour la recherche.
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Physique
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En physique, l’un des enjeux majeurs consiste à mieux évaluer un phénomène susceptible de fortement modifier les effets de la carbonethérapie : la fragmentation des ions carbone. “Contrairement aux rayons X et aux protons, ces ions peuvent, quand ils percutent des atomes du corps humain, ‘se casser’ en particules plus petites. Plus légères, celles-ci peuvent aller beaucoup plus loin que la cible initiale, et occasionner des dégâts dans des tissus sains”, explique Daniel Cussol.»
Médecine
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Côté médecins, l’un des défis essentiels à relever est de vérifier rigoureusement la supériorité de l’hadronthérapie, et notamment de la carbonethérapie, sur les autres traitements existants. Pour ce faire, une dizaine d’essais cliniques de phase 3 sont en cours dans le monde.“En décembre 2017, nous avons lancé une étude sur 250 patients recrutés dans une vingtaine de centres en France. La moitié sera traitée dans un centre de carbonethérapie italien ; et l’autre, par radiothérapie classique ou éventuellement protonthérapie en France. Financé par l’Assurance-maladie et mené sous la responsabilité légale des hospices de Lyon, cet essai vise à évaluer et à comparer le taux de survie sans rechute, la toxicité, et le coût de ces différents traitements”, indique Jacques Balosso. Les premiers résultats devraient arriver dans cinq ans. »
Biologie
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Afin d’évaluer précisément la balance bénéfices-risques de cette thérapie, il faut aussi étudier finement ses effets sur les tumeurs – notamment “hypoxiques” (avec un faible taux d’oxygène tissulaire), résistantes à la radiothérapie classique – ; et sur le tissu sain, en particulier le cerveau. C’est le domaine de la biologie.»
Photo : Accélérateur ProteusOne, machine de soins de protonthérapie, inauguré au centre Cyclhad, à Caen, ce 5 juillet 2018. Source : CNRS
Psychomédia avec source : CNRS - Le journal.
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