Des chercheurs ont identifié une composante inconnue de l'anatomie humaine. Il s'agit de l'interstitium, constitué d'un réseau d'espaces remplis de liquide, dans les tissus conjonctifs du corps, dont le derme de la peau.
Cette découverte a des implications pour la compréhension du fonctionnement de tous les organes et de la plupart des tissus ainsi que des mécanismes de la plupart des principales maladies, soulignent les chercheurs.
L'étude, publiée dans la revue Scientific Reports, montre que ce qui était considéré comme étant des couches denses de tissus conjonctifs constitue plutôt les parois de compartiments remplis de liquide qui sont interconnectés.
Ces espaces ont été découverts dans les tissus conjonctifs de tout le corps, dont ceux sous la surface de la peau, ceux tapissant le tube digestif, les poumons et le système urinaire, et ceux entourant les muscles.
Cette série d'espaces, soutenue par un réseau de protéines fortes (collagène) et flexibles (élastine) des tissus conjonctifs, peut jouer un rôle d'absorption des chocs qui empêche les tissus de se déchirer alors que les organes, les muscles et les vaisseaux se contractent et se détendent dans l'exécution de leur fonction quotidienne.
La découverte de cette autoroute de fluide en mouvement peut expliquer pourquoi le cancer qui l'envahit devient beaucoup plus susceptible de se propager, mentionnent les chercheurs. Se drainant dans le système lymphatique, ce réseau nouvellement découvert est la source de la lymphe, le fluide vital au fonctionnement des cellules immunitaires qui génèrent l'inflammation. De plus, les cellules qui résident dans cet espace et les faisceaux de collagène qui le tapissent changent avec l'âge et peuvent contribuer aux rides de la peau, au raidissement des membres et à la progression des maladies fibrotiques, sclérotiques et inflammatoires.
Il est connu longtemps que plus de la moitié du fluide dans le corps réside dans les cellules, et environ un septième à l'intérieur du cœur, des vaisseaux sanguins, des ganglions lymphatiques et des vaisseaux lymphatiques. Le fluide restant est « interstitiel », et la présente étude est la première à définir l'interstitium comme un organe à part entière, et comme l'un des plus grands du corps, selon les auteurs.
Personne n'a vu ces espaces auparavant en raison de la dépendance du domaine médical à l'examen de tissus fixes sur des lames de microscope, explique Neil Theise, pathologiste de la New York University (NYU), coauteur principal. Les résultats de cette nouvelle étude sont basés sur une nouvelle technologie d'endomicroscopie au laser qui offre une vue microscopique des tissus vivants au lieu de tissus fixes.
En utilisant cette technologie, David Carr-Locke et Petros Benias, endoscopistes et coauteurs, ont vu quelque chose d'étrange alors qu'ils sondaient le canal cholédoque d'un patient pour détecter la propagation du cancer. Il s'agissait d'une série de cavités interconnectées au niveau du tissu sous-muqueux qui ne correspondait à aucune anatomie connue.
Face à ce mystère, ils ont fait parvenir les images à Theise. Lorsque celui-ci a fait des lames de biopsie à partir du même tissu, le motif réticulaire trouvé par endomicroscopie a disparu. L'équipe confirmera plus tard que les espaces très minces que l'on voit dans les lames de biopsie, traditionnellement rejetées comme des déchirures dans les tissus, étaient plutôt les restes de compartiments effondrés, auparavant remplis de liquide.
Dans la présente étude, l'équipe a prélevé des échantillons de tissus de canaux biliaires au cours de douze chirurgies du cancer dans lesquelles étaient enlevés le pancréas et le canal cholédoque. Quelques minutes avant de bloquer le flux sanguin vers le tissu cible, les patients ont subi une microscopie confocale pour l'imagerie des tissus vivants.
Une fois que l'équipe a reconnu ce nouvel espace dans les images des canaux biliaires, elle l'a rapidement reconnu dans tout le corps, partout où les tissus bougent ou sont comprimés par la force. « Les cellules qui bordent l'espace sont également inhabituelles, peut-être responsables de la création des faisceaux de collagène qui les entourent, affirment les auteurs. Elles peuvent aussi être des cellules souches mésenchymateuses, explique Theise, dont on sait qu'elles peuvent contribuer à la formation de tissu cicatriciel dans les maladies inflammatoires. Enfin, les faisceaux de protéines observés dans cet espace sont susceptibles de générer du courant électrique, car ils se plient avec les mouvements des organes et des muscles, et peuvent jouer un rôle dans des techniques comme l'acupuncture.
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« Cette découverte a le potentiel d'entraîner des progrès spectaculaires en médecine, y compris la possibilité que l'échantillonnage direct du liquide interstitiel puisse devenir un outil de diagnostic puissant, mentionnent les chercheurs.
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En 2017, des chercheurs ont découvert un 79e organe humain, présent dans le système digestif, le mésentère.
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Psychomédia avec sources : NYU Langone Health, Scientific Reports.
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