Un nouveau dispositif permettant d'évaluer la douleur avec beaucoup plus de précision pendant une chirurgie sous anesthésie est testé par des chercheurs de l'université de Montréal et de l'Hôpital Maisonneuve-Rosemont, rapporte la journaliste Pauline Gravel dans Le Devoir.
« Depuis 20 ans, explique le Dr Philippe Richebé, nous disposons de moniteurs qui surveillent de façon assez correcte la profondeur de l’anesthésie, particulièrement celle du sommeil et de la relaxation musculaire, et qui nous disent si le patient dort assez profondément. Nous avons par contre un peu de difficulté à savoir si le patient ressent ou pas de la douleur. »
Jusqu’à récemment, les anesthésistes évaluaient la douleur en se basant sur la fréquence cardiaque et la pression artérielle. Mais, on sait maintenant que ces deux critères ne sont pas assez sensibles et spécifiques.
« On avait l’impression de faire du bon travail, mais on ne savait pas que les gens ressentaient de la douleur. Or, avec le nouveau moniteur que nous étudions, on peut savoir que même si la pression d’un patient est bonne, ce dernier ressent néanmoins quelque chose
», explique le chercheur.
On sait aujourd’hui que plus la douleur ressentie pendant et juste après l’opération est intense, plus le risque de développer des douleurs chroniques à long terme est élevé, et plus la probabilité est grande que le système nerveux ait enregistré cette douleur et que celle-ci réapparaisse six mois ou un an après la chirurgie dans la zone de la chirurgie.
« Ce n’est pas parce que le cerveau ne se souvient pas de la douleur ressentie durant l’opération que le corps ne s’en souvient pas.
» Les neurones activent un mécanisme de mémoire de la douleur, et si celle-ci est très intense durant l’opération, elle risque de persister.
Environ 10 % à 15 % des personnes subissant une chirurgie sous anesthésie générale développeraient des douleurs chroniques. Il faut donc trouver le moyen d’administrer la juste dose d’opiacés au bon moment de façon à ce que les neurones n’activent pas ce mécanisme.
Les moniteurs de la douleur dont disposent les anesthésistes depuis 2010 surveillent le diamètre de la pupille de l’œil ou la fréquence cardiaque. « Leur faiblesse vient du fait qu’ils sont basés sur un seul paramètre. L’avantage du nouveau moniteur que nous étudions est qu’il est multiparamétrique », explique le Dr Richebé. Le système nerveux autonome et le système hormonal de l’organisme réagissent aux stimuli douloureux par divers mécanismes qui induisent des changements mesurables.
Le nouveau moniteur de la compagnie israélienne Medasense Biometrics Ltd., nommé PMD 200 (« pain monitoring device »), surveille continuellement ces paramètres. Un algorithme convertit ces données physiologiques en un index de douleur appelé Nol (pour « nociception level index »).
Le dispositif comprend une petite sonde, munie de 4 capteurs, que l’on pince au bout du doigt. Un capteur mesure la pulsatilité des capillaires. Un autre mesure la conductance électrique cutanée qui renseigne sur le niveau de stress. Ce monitorage vise à évaluer l’équilibre entre les systèmes nerveux sympathique et parasympathique, deux systèmes qui varient en fonction du stress. Un déséquilibre entre ces deux systèmes témoigne de la douleur ressentie, précise le chercheur.
L’équipe du Dr Philippe Richebé mène depuis quatre ans des études cliniques visant à valider cette technologie et à l’améliorer. Elle commencera sous peu une étude dans laquelle deux groupes recevant une anesthésie seront comparés : anesthésie classique versus anesthésie avec le nouveau dispositif.
Cette étude fait partie d'un essai multicentrique pancanadien en vue d'une demande d'autorisation d'autorisation de mise sur le marché auprès de Santé Canada. La compagnie Medasense a déposé cette année une demande en Europe et fera de même aux États-Unis l’année prochaine. On peut espérer voir apparaître le moniteur sur le marché canadien en 2018.
Psychomédia avec source : Le Devoir.
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