Chez les femmes ménopausées à risque, l'Aromasine (exemestane), un traitement hormonal déjà utilisé pour le traitement du cancer du sein, réduit de 65% le risque de survenue de la maladie, selon un essai clinique de phase 3 présenté au congrès de la Société américaine d'oncologie clinique (Asco) et publiée dans le prestigieux New England Journal of Medicine (NEJM).
Ce médicament fait partie de la classe des inhibiteurs de l'aromatase dont l'action est d'empêcher la production d'œstrogène. Deux médicaments de cette classe, le tamoxifène et le raloxifène, sont approuvés aux États-Unis pour la prévention du cancer du sein chez des femmes en santé, mais ils sont peu prescrits en raison d'effets secondaires graves (cancer de l'utérus, caillots sanguins...). En France, ils ne sont pas approuvés pour la prévention, précise Le Figaro.
Chez les femmes ménopausées, l'exemestane est devenu l'hormonothérapie de référence pour prévenir les récidives de cancers du sein. Dans cette indication, il s'est révélé plus efficace et moins toxique que le tamoxifène, d'où l'idée de l'étudier en prévention avant la survenue d'un premier cancer.
Paul Goss de l'Université de Harvard, et ses collègues ont mené cette étude avec 4560 femmes ménopausées en santé mais présentant au moins un risque de cancer du sein (dont le simple fait d'avoir 60 ans ou plus, une mutation génétique BRCA1 ou BRCA2, antécédents familiaux, des tumeurs bénignes du sein) dont la moitié recevait quotidiennement l'exemestane et l'autre par un placebo. Après 3 ans, 43 cancers invasifs sont survenus: 32 dans le groupe placebo et 11 dans celui recevant le médicament, soit une réduction de 65%.
Parce qu'il supprime l'œstrogène, le médicament amplifie les symptômes de ménopause. Les effets secondaires plus fréquents dans le groupe recevant le médicament étaient des bouffées de chaleur, la fatigue, la transpiration, l'insomnie et des douleurs articulaires (arthrite). Sur cette courte période de 3 ans, aucune toxicité cardiovasculaire ou osseuse n'a été observée, ni d'excès d'autres cancers, ce qui est à suivre à plus long terme car ces effets ont été associés à cette classe de médicaments dans des études précédentes, mentionne le Globe and Mail.
Les deux éditorialistes du NEJM sont favorables à ce traitement en prévention, même s'il implique de traiter 94 femmes, avec les effets secondaires que cela comporte, pour éviter l'apparition d'un cancer chez une seule d'entre elles: «Les cancers du sein sont la deuxième cause de décès par cancer et l'un des diagnostics les plus redoutés par les femmes américaines. Aujourd'hui, nous avons les connaissances et des outils pour diminuer leur incidence. Nous n'avons plus d'excuses. Qu'est-ce que nous attendons?»
Cette stratégie ne fait pas l'unanimité. «Les inhibiteurs d'aromatase entraînent chez 30% des patientes des douleurs articulaires qui peuvent être gênantes. Donner un traitement qui induit des effets secondaires à quelqu'un qui ne se plaint de rien est discutable», considère le Pr Pierre Kerbrat (CHU de Rennes) dont les propos sont rapportés par Le Figaro.
L'étude était financée par la Société canadienne du cancer et Pfizer, mentionne le Boston Globe.
Deux autres essais de prévention avec des inhibiteurs d'aromatase sont en cours, dont un coordonné par le Pr Pascal Pujol qui a coordonné le présent essai en France, chez des femmes avec une mutation BRCA1 ou 2. Cette étude française promue par Unicancer (Fédération française des centres de lutte contre le cancer) a cependant du mal à avancer. Sur les 500 femmes nécessaires, seulement 120 ont été recrutées, indique Le Figaro.
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